La réforme des académies ecclésiastiques et l'enseignement de la théologie orthodoxe en Russie au début du XXe siècle

Ecclesiastical Academies Reform and Theological Teaching in Russia at the Beginning of the 20th Century

• Auteur / Autrice : Hyacinthe Destivelle
• Direction : Francis Conte, Laurent Villemin
• Type : Thèse de doctorat
• Discipline(s) : Études slaves
• Date : Soutenance en 2008
• Etablissement(s) : Paris 4
• Partenaire(s) de recherche : autre partenaire : Institut catholique de Paris. Faculté de théologie et de sciences religieusesCycle des études du doctorat (Paris)

Mots clés

Mots clés contrôlés

Clergé -- Formation

Russkaâ pravoslavnaâ cerkovʹ

Histoire religieuse -- Russie -- 1917-1991

Histoire religieuse -- Russie -- 1801-1917

Étude et enseignement

Église orthodoxe -- Doctrines

Enseignement supérieur -- Politique publique

Vingtième siècle

Dix-neuvième siècle

Russie

Ordres monastiques et religieux

Mots clés libres

Neopatristique

Résumé

Au début du XXe siècle, les académies ecclésiastiques étaient en Russie les principaux foyers d’une théologie orthodoxe en plein essor. Pourtant, l'enseignement de ces établissements supérieurs faisait l'objet de sévères critiques : il aurait isolé la théologie de la société, perpétué la "captivité occidentale" de la pensée russe, dissocié la science religieuse de l'expérience spirituelle. C'est pourquoi l'Église orthodoxe russe organisa entre 1905 et 1918, dans le contexte de la préparation au Concile local de Moscou, plusieurs commissions rassemblant les représentants d'une nouvelle génération de théologiens en vue de réformer les académies. En s'appuyant sur les archives de ces commissions préconciliaires et conciliaires, la présente recherche restitue les principaux débats, dans l'ambition de montrer comment un type d'enseignement génère une théologie particulière. Après une première partie chronologique destinée à situer cette réflexion dans son cadre historique, trois parties synthétiques sont consacrées aux trois grandes questions posées par la réforme des académies. Au plan pédagogique, comment penser le rapport entre la formation intellectuelle et la formation spirituelle ou pastorale ? Au point de vue administratif et ecclésiologique, quelle est la place des académies dans l'Église et quel rôle l’évêque local doit-il jouer dans leur enseignement ? Au plan scientifique enfin, comment penser, dans les programmes de formation et de recherche, l'articulation entre les sciences humaines et les disciplines théologiques ? Une dernière partie analyse l'évolution de l’enseignement des académies ecclésiastiques russes dans les divers domaines de la théologie (études bibliques, patrologie, théologie systématique, théologie pratique) et la naissance en leur sein d'un véritable "pré-œcuménisme" au tournant du XXe siècle. Les débats témoignent de la rencontre de deux courants de la théologie russe : d’une part, un courant "académique", qui défend la vocation scientifique des académies, leur autonomie administrative et intellectuelle, le rôle des disciplines positives et de la méthode historico-critique ; et d’autre part un courant "néopatristique" porté par le monachisme savant, soucieux de l'intégration à la théologie de la dimension spirituelle et pratique, d'un retour aux sources bibliques et aux Pères de l'Église. La rencontre de ces deux courants, favorisée par le processus conciliaire, permit de penser dans la Russie de l'époque, dans une perspective étonnamment actuelle, un nouvel enseignement de la théologie, et, partant, un nouveau type de théologie.

At the beginning of the 20th century, ecclesiastical academies in Russia were the primary centers of a rapidly expanding orthodox theology. However, the instruction dispensed in these establishments of higher learning fell under severe criticism : they had allegedly isolated theology from society, perpetuated a westernization of Russian thinking and severed religious science from spiritual experience. The Russian Orthodox Church was thus prompted to assemble between 1905 and 1918, in anticipation of the local Moscow council, several committees that would include representatives of a new generation of theologians in order to reform the academies. Backed by the supporting evidence of the archives of the relevant pre-council and council committees, this study aims to bring forward the principal debates and show how a particular form of instruction breeds a particular form of theology. Our first section will establish a chronology in order to contextualise our current study. The three subsequent sections will address the three main questions problematised by the academic reforms : From a pedagogical point of view, how might we renegotiate the dynamic between intellectual, spiritual and pastoral education ? From an administrative and ecclesiological perspective, what position do religious schools hold within the Church and what say should the local bishops have ? Finally, from a scientific standpoint, how can we rearticulate, within programmes of education and research, the relationship between the arts and theological disciplines? A concluding section will examine the evolution of various areas of theology (namely biblical and patrological studies as well as systematic and practical theology) as taught in Russian ecclesiastical schools, together with the rise in these schools of a genuine pre-ecumenical current at the turn of the 20th century. The debates pit against each other two distinct schools of thinking in Russian theology. On the one hand, the "academic" camp privileges the schools' scientific calling, both administrative and intellectual autonomy, the importance of positive discipline and a critical historical method. On the other hand, a neo-patristic camp, boosted by learned monasticism, endeavours to incorporate into theology spiritual and practical aspects, and encourages a return to biblical sources and to Patristic writings. Out of the dialogue between these two schools of thought, facilitated by the Council process, a surprisingly progressive method of teaching theology and thus a new theology per se, were carved.