Thèse soutenue

Produire des connaissances pertinentes pour l'action en sciences de la conservation : cas de la gestion de la diversité génétique intraspécifique en restauration écologique

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Auteur / Autrice : Héloïse Gonzalo-Turpin
Direction : Laurent HazardNathalie Couix
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie des populations et écologie
Date : Soutenance en 2008
Etablissement(s) : Toulouse, INPT

Résumé

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Les sciences de la conservation ont pour objet l'évaluation des dégradations causées à la biodiversité et la conception de solutions pour la conserver et la restaurer. Si ces sciences sont historiquement ancrées dans des disciplines biologiques, elles s'en différencient car elles sont explicitement destinées à l'action. Cela suppose la conception de projets en collaboration avec des acteurs de terrain et l'adoption d'une certaine interdisciplinarité. Très peu d'auteurs relatent ce que ces deux perspectives impliquent concrètement concernant les projets de gestion de la biodiversité et la recherche en sciences de la conservation. L'enjeu principal de cette thèse était de mettre concrètement en œuvre ces perspectives afin de produire des connaissances plus pertinentes pour l'action dans un projet relatif à la gestion de la biodiversité, et ce faisant, de donner à voir le cheminement que cela suppose pour un biologiste pratiquant les sciences de la conservation. Ce travail de thèse est ancré dans le projet Ecovars (2005-2007). Ce projet était porté par le Conservatoire Botanique Pyrénéen en partenariat avec l'Institut National de la Recherche Agronomique et le Service d'Utilité Inter-chambres d'Agriculture des Pyrénées. L'objectif finalisé de la thèse était d'établir un outil (des zones de transfert de graines) permettant de gérer sur le massif pyrénéen la diversité génétique intraspécifique de la flore locale. Cette gestion devait intégrer les points de vue des acteurs utilisant les espaces à restaurer. Ce travail s'appuie sur l'étude conjointe des diversités génétiques neutre et adaptative d'une graminée alpine sauvage (Festuca eskia) destinée à la restauration des pelouses alpines, de son patron d'infection par un endophyte (Epichloë festucae) et des points de vue d'acteurs concernés par des opérations de restauration. L'étude conjointe de la diversité génétique neutre et de l'endophytisme met en évidence que F. Eskia est divisée en deux entités génétiques distinctes (Est versus Ouest). L'étude de la diversité génétique adaptative montre que F. Eskia présente une différenciation génétique adaptative le long des gradients altitudinaux, malgré des flux de gènes important entre altitudes. Cette étude montre aussi que le potentiel adaptatif de F. Eskia n'est pas faible et ne diminue pas avec l'altitude contrairement aux hypothèses classiques sur les plantes alpines. La complexité des patrons génétiques mis en évidence amène à reconsidérer la pertinence d'établir des zones de transfert de graines. Au-delà, l'analyse des points de vue d'acteurs conduit à abandonner l'idée d'un mode de gestion uniforme de la diversité génétique et plus généralement conduit à proposer l'intégration de la restauration à une gestion globale des territoires. Par ailleurs, l'analyse de cette expérience au sein d'Ecovars montre la nécessité de repenser le partenariat dans les projets de conservation et de restauration afin de produire des connaissances pertinentes pour l'action. A l'issue de ce travail, mon cheminement m'amène à proposer de raisonner les opérations de restauration comme des constructions collectives et locales. Ce cheminement effectué au cours de ma thèse, depuis une approche basée sur des référentiels disciplinaires (dans mon cas la biologie évolutive et l'écologie) jusqu'à une approche plus holiste et plus relativiste des sciences de la conservation est à mon sens ce qui permettrait aux biologistes de faire des sciences de la conservation de vraies sciences pour l'action.