Thèse soutenue

Légalité pénale et droits fondamentaux

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Auteur / Autrice : William Benessiano
Direction : Richard Ghevontian
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Droit
Date : Soutenance en 2008
Etablissement(s) : Aix-Marseille 3

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Originellement outil de lutte contre l’arbitraire judiciaire (arbitrium judicis), le principe de légalité des délits et des peines (nullum crimen, nulla poena sine lege) trouve aujourd’hui en différents juges de fervents défenseurs, ces derniers agissant au nom de la garantie des droits fondamentaux, par le truchement du contrôle de la qualité de la norme, son interprétation, son individualisation et le respect d’une procédure équitable. Portalis voulait « des lois précises et point de jurisprudence ». Mais, lorsque le législateur fait fi de précision, multiplie les infractions ou élude la compétence du juge pénal en matière punitive, seule l’intervention du juge et/ou l’application des principes de droit constitutionnel pénal peuvent accomplir cette mission, paradigme moderne de l’État de droit. L’origine de ce contrôle revient aux organes institués par la Convention européenne des droits de l’homme dont la préoccupation constante est l’effectivité des droits et libertés protégés. Indéniablement inspirés, le Conseil constitutionnel et le juge ordinaire ont, à leur tour, exigé certaines qualités de la norme pénale. Néanmoins, l’attitude du juge, dont le risque principal serait que cette « nouvelle légalité » devienne un moyen pour lui de trop étendre ses compétences en sanctionnant systématiquement la norme produite par le législateur, est soupçonnée de balayer par là même la séparation des pouvoirs, principe d’autant plus battu en brèche depuis l’émergence des autorités administrative indépendante et d’une répression administrative (plus ancienne), succédané d’un droit « para-pénal ». Les analyses du recul du principe de la légalité des délits et des peines sont devenues des poncifs (la complexité du droit ou la diversification de ses sources en sont les causes principales) dont l’État de droit ne pâtit aucunement dans la mesure où la substance et la justification originelle du principe sont assurées pour autant. Si les influences liées à l’internationalisation et à la spécialisation du droit ont eu raison du principe légaliste tel qu’il apparaissait à l’origine, c’est-à-dire avec la loi comme unique source du droit pénal, le principe de légalité criminelle, loin d’être rigide, témoigne d’une capacité d’adaptation (« résilience ») et d’intégration du nouvel ordre juridique supranational, notamment par le biais du droit à un procès équitable, propice à un relatif effacement de la summa divisio. Celui-ci conduit, par exemple, le Conseil constitutionnel à matérialiser les changements de la légalité par la création de l’objectif à valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, ou par la consécration du principe de clarté de la loi, sorte d’ersatz de la légalité criminelle. Enfin, c’est par le biais de techniques classiques mises à sa disposition (individualisation des sanctions et interprétation de la norme) que le juge ordinaire parvient à instiller une dose « d’équité-correctrice », devenue nécessaire face aux impérities éprouvées de la légalité formelle. En d’autres termes, de la même manière qu’une démocratie ne s’exprime pas uniquement par le suffrage universel direct, l’accomplissement de l’État de droit se mesure davantage à l’aune de l’efficience de la garantie juridictionnelle des droits fondamentaux que du recours à une conception formelle surannée du principe de la légalité des délits et des peines.