Thèse soutenue

Etude du rôle des ARNs non codants dans la régulation épigénétique des réarrangements programmés du génome chez Paramecium tetraurelia

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Auteur / Autrice : Vincent Serrano
Direction : Éric Meyer
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Génétique cellulaire et moléculaire
Date : Soutenance en 2007
Etablissement(s) : Paris 6

Résumé

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Les ciliés sont des eucaryotes unicellulaires qui présentent un dimorphisme nucléaire. Chez Paramecium tetraurelia, le macronoyau polyploïde assure l’essentiel de la transcription nécessaire à la vie de la cellule, alors que le micronoyau diploïde est silencieux et assure une fonction germinale. A chaque cycle sexuel, la paramécie est amenée à fabriquer un nouveau macronoyau somatique à partir d’un micronoyau. Au court de ce processus, le génome du macronoyau en formation est amplifié et réarrangé de manière reproductible. Un ensemble de séquences non codantes, appelées IES, sont alors éliminées activement, ainsi que des séquences de type minisatellite et transposon, séquences qui sont généralement retrouvées sous forme d’hétérochromatine chez les autres eucaryotes. En fait, ces séquences micronucléaires ne sont pas suffisantes en elles-mêmes pour programmer leurs éliminations. Ces éliminations sont programmées par un mécanisme épigénétique qui semble éliminer du macronoyau en développement les séquences qui sont absentes du macronoyau maternel. Le choix des séquences d’ADN à éliminer parait donc être déterminé par un mécanisme dépendant de l’homologie de séquence qui compare le génome du macronoyau en cours de développement à celui du macronoyau maternel. De plus, un autre phénomène dépendant de l’homologie de séquence a été caractérisé : c’est l’inactivation posttranscriptionnelle des gènes. Cette inactivation est induite soit par injection d’un transgène sous une forme non exprimable dans le macronoyau, soit après ingestion par la paramécie de bactéries modifiées pour accumuler de l’ARN double brin correspondant à un fragment du gène cible. Mon travail de thèse est centré sur l’étude du rôle de molécules d’ARNs non codants et des protéines de type Dicer intervenant dans ces phénomènes dépendant de l’homologie chez Paramecium tetraurelia. J'ai montré que des molécules d’ARNs de 23 nucléotides correspondant à la séquence du gène ciblé sont accumulées lors d'expériences de transformation nucléaire induisant l’inactivation d’un gène donné et semblent similaires aux siRNA responsables des phénomènes d’ARN interférence observés chez de nombreux eucaryotes. Après cette phase d’inactivation, le gène ciblé sera éliminé du génome du macronoyau formé dans la génération suivante. L’abondance de ces ARNs de 23 nucléotides détectés durant la vie végétative corrèlent avec l’efficacité de l’induction de la délétion du gène ciblé dans le macronoyau en développement. De plus, j'ai montré que les paramécies nourries avec des bactéries produisant de l’ARN double brin, accumulaient également ces petits ARNs de 23 nucléotides caractéristiques, accumulation associée à la disparition de l’ARN messager du gène ciblé. A la génération suivante, lors de la différenciation du nouveau macronoyau, ces paramécies induisent la délétion du gènes inactivé précédemment. J’ai démontré que ces phénomènes d’inactivations et de délétions induites sont dépendants de l’action d’un gène dicer-like appelé DcrA, gène nécessaire pour la production de ces petits ARNs. Ainsi, ces ARNs de 23 nucléotides sont non seulement nécessaires à l’extinction du gène endogène homologue, mais sont également requis lors de l’induction de délétion de ce même gène dans les macronoyaux de la descendance sexuelle. Une fois induites, ces délétions sont héritées maternellement dans la descendance sexuelle, alors que ni transgène ni bactéries susceptibles de fournir des ARNs de 23 nucléotides ne sont présents. J’ai montré que ces délétions héritées dépendent de la présence d’un autre type de petits ARNs, de 25 nucléotides, endogènes, spécifiquement produits au tout début de la méiose par les micronoyaux. Ainsi, deux autres gènes dicer-like, sans domaine hélicase, appelés RncA2 et RncB1, sont requis à la fois pour l’accumulation de ces ARNs spécialisés , mais aussi pour l’élimination des transposons, pour l’excision des IES et pour l’héritabilité des délétions des gènes. Ceci nous permet de proposer un modèle tentant d’expliquer comment s’effectue le choix des séquences d’ADN à éliminer, processus faisant intervenir une comparaison globale du génome micronucléaire et macronuclaire via de petites molécules d’ARNs.