Thèse de doctorat en Études cinématographiques et audiovisuelles
Sous la direction de Jean-Louis Leutrat.
Soutenue en 2004
à Paris 3 .
Œdipe roi de Pier Paolo Pasolini (1967), Hiroshima mon amour d’Alain Resnais (1959) et les textes critiques d’André Bazin se donnent à la fois comme les témoins et les acteurs d’une relation théorique en acte qui se propose de réfléchir à la notion de mimesis dans la modernité cinématographique. Ces trois systèmes sont le fondement d’une interrogation sur la représentation et l’imitation cinématographiques au sein de ce que Jacques Rancière nomme « le régime esthétique de l’art », à partir d’un retour vers ce qui constitue l’essence de la mimesis : les textes de Platon et ceux d’Aristote. Une hypothèse est ici avancée : du cinéma moderne émergerait un paradoxe, celui du double cinématographique, suivant lequel le cinéma serait à la fois présenté comme une duplication, la reproduction parfaite de son modèle, reproduction qui double le monde jusqu’à se confondre avec lui, et comme le double grotesque des corps, ressemblance trompeuse, épuisée, imitation dérisoire d’un modèle. Ce double statut implique que la duplication cinématographique soit régie par une logique du même et de l’autre, de l’identité et de la différence, de la présence et de l’absence. Cette émergence de la mimesis au cœur du cinématographique soustrait la copie cinématographique, le double, à la valeur de l’imitation ontique, saisie comme imitatio, comme action de reproduire ou de chercher à reproduire suivant la logique de l’homoïosis, d’où la nécessité d’étudier les conséquences de l’immersion de ce concept antique dans la notion de modernité cinématographique.
Analysis of the cinema replica in Edipo re by Pier Paolo Pasolini, Hiroshima mon amour by Alain Resnais and in reviews by André Bazin
Edipo Re by Pier Paolo Pasolini, Hiroshima mon amour by Alain Resnais and reviews by André Bazin are the testimonies of a theory which tackles the problem of mimesis in the ²cinema modernity ²; this modernity has been raised by Gilles Deleuze. Those three systems are the basis of a questioning about the representation and imitation in cinema, within Jacques Rancière calls ² the ‘aesthetic’ form of art², a questioning based on the first texts dealing with mimesis : the works by Plato and Aristotle. Let’s bring forward the following hypothesis : modern cinema has emphasized a paradox entitled ² double cinématographique ², implying that cinema is both a duplication – a perfect reproduction of an original, a reproduction which copies the world to become one and the same thing – and a grotesque replica of a matter, a misleading resemblance, and a derisory imitation of an original. This double status implies that the cinema duplication is ruled by a logic of similarity and difference, a logic of presence and absence. This emergence of mimesis leads to the following awareness : the cinema replica does not only mean reproducing or trying to reproduce according to the homoïosis logic, hence the necessity of studying the consequences of the insertion of this antiquity concept in the "cinema modernity" notion.