Thèse de doctorat en Philosophie
Sous la direction de Michel Fichant.
Soutenue en 2003
à Paris 4 .
Le jury était composé de Pierre-François Moreau, Lucien Bély, Michel Fichant.
Les rapporteurs étaient Martine de Gaudemar.
Désireux d'obtenir pour ses envoyés au Congrès de Nimègue le rang d'ambassadeur, le prince de Hanovre, Jean-Frédéric de Brunswick-Lunebourg, chargea Leibniz de défendre son droit de légation. Le philosophe composa ainsi en 1677 le De jure suprematus ac legationis principum Germaniae qu'il signe du nom de Caesarinus Fürstenerius. A lui seul, ce pseudonyme pose la problématique : petit César, petit prince ou comment concilier la souveraineté des princes d'Allemagne avec leur appartenance au Saint Empire romain germanique ? Pour répondre à la question, Leibniz distingue, au sein de l'autocratie, la souveraineté et la majesté. La première n'est plus que le droit de contraindre les siens, sans être contraint si ce n'est par une guerre, tandis que la seconde est le droit de commander sans être commandé. Si de prime abord cette distinction semblait dictée par la commande de Jean-Frédéric, elle trouve cependant sa justification en dehors des circonstances. La reconstitution patiente du concept de souveraineté offre une originalité dans ses dimensions interne et externe. A l'interne, Leibniz justifie, sans pour autant recourir à un nouveau contractualisme, la soumission des sujets au souverain par la considération que celui-ci leur porte et la sécurité qu'il leur garantit. A l'externe, la rétention de la souveraineté, nonobstant la soumission à l'autorité d'un supérieur, permet de rendre compte pour sa part de la constitution de fédérations. Ne se contentant ni de chercher à servir les intérêts d'un prince, ni d'expliquer les situations les plus diverses, le concept de souveraineté concentre la pensée politique de Leibniz. Au-delà de son appel à une monarchie parlementaire, il ouvre les voies iréniques qu'empruntera Leibniz, s'élevant de l'unité des Etats à leur union. Invitation à revisiter une pensée politique négligée, ce concept brise nos certitudes : la souveraineté ne serait plus dans la rivalité des indépendances, mais dans l'équilibre des relations
The concept of sovereignty in Leibniz' political thought
Eager to get for his envoys the title of ambassador to Nijmegen Congress, the prince of Hanover, John Frederick of Brunswick-Luneburg, entrusted Leibniz with the duty of defending his legation right. Thus, in 1677, the philosopher composed the De jure suprematus ac legationis principum Germaniae that he signed with the name of Caesarinus Fürstenerius. This pen-name by itself sets problematics : little Cesar, littel prince. . . Or how to conciliate German princes' sovereignty with their membership of the Holy Roman Empire ? To answer the question, Leibniz distinguishes sovereignty from majesty within the autocracy. The first one is no more than the right of forcing its own without being forced except by a war, whereas the second one is the right of ordering without being ordered. If at first sight this distinction seemed imposed by the will of John Frederick, it is however justified out of circumstances. Patient reconstitution of the sovereignty concept presents an originality in its internal and external sides. Inside, without having recourse to a new contractarianism, Leibniz justifies the subjects obedience to the sovereign by the regard he brings them and the safety he grants them. Outside, sovereignty retention, notwithstanding obedience to upper authority, allows, in its part, to account for federations constitution. The sovereingty concept neither making shift with trying to serve a prince's interests nor explaining the most various situations, concentrates Leibniz's political thought. Beyond its appeal to a parliamentary monarchy, it opens the irenic ways Leibniz will follow, rising from the states unity to their union. Invitation to visit again a neglected political thought, this concept breaks our certitudes : sovereignty would not be any longer in independencies rivalry, but in the balance of relationships. . .