Thèse de doctorat en Nutrition
Sous la direction de Christian Rémésy.
Soutenue en 2001
L'apport de céréales joue un rôle majeur dans l'alimentation humaine. Pourtant le blé destiné à la panification a principalement été sélectionné sur des critères d'efficacité agronomique, de rendement et de valeur boulangère sans tenir compte des autres paramètres nutritionnels (fibres, minéraux, vitamines). L'objectif de cette thèse a donc été de faire des recherches en vue de l'amélioration de la qualité nutritionnelle du blé. Pour améliorer la teneur en minéraux, une vingtaine de variétés d'origine différente (France, Chine, Nouvelle Zélande, République Tchèque) ont été sélectionnées en particulier en tenant compte de leur teneur en acide phytique et de leur activité phytasique. Afin d'apprécier l'influence spécifique des variétés, celles-ci ont été cultivées la même année (1999) dans les mêmes conditions agronomiques. Cette étude a permis de distinguer deux variétés de blé pour leur richesse en minéraux et leur rapport élevé activité phytasique / phytate : il s'agit d'un blé noir chinois et du blé violet Konini. Nous avons ensuite testé la biodisponibilité minérale des variétés de blé chez des rats nourris avec une base de farine complète. Les variétés étudiées ont été Soissons pour son importance culturale en France, Hardi pour sa faible teneur en acide phytique et le blé noir et la variété Konini pour leur richesse minérale. Par rapport à un régime semi-synthétique, la variété Soissons provoque une diminution de l'absorption du fer et du zinc alors que les variétés de blé noir chinois et Konini améliorent les bilans digestifs en magnésium, fer, zinc et cuivre. Divers paramètres reflétant le statut en minéraux (Mg, Fe, Zn) témoignent de cette augmentation de l'absorption apparente. Cette meilleure biodisponibilité minérale des deux variétés colorées peut être le résultat d'un meilleur rapport minéraux / acide phytique ainsi d'une activité phytasique végétale plus importante par rapport aux deux autres variétés testées. Par ailleurs, nous avons évalué l'influence de la nature du sol sur la teneur en minéraux d'une variété de blé tendre (NSA001) cultivée dans des sols d'origine différente en Auvergne. Les deux seuls paramètres qui varient de façon importante sont les teneurs en fer et en manganèse. Les teneurs en acide phytique, potassium, magnésium, calcium, zinc ou cuivre sont restées assez constantes dans des conditions de fertilisation standard. Après cette étude sur la variabilité de la teneur en minéraux des blés, nous avons évalué l'influence de la panification sur la biodisponibilité minérale. Nous avons d'abord testé in vitro l'activité phytasique de souches bactériennes isolées à partir de levains de panification. Elles dégradaient toutes l'acide phytique avec la même activité. De plus, par la destruction des phytates et par l'acidification de la farine, ces bactéries lactiques augmentaient la solubilité des minéraux comme le magnésium ou le phosphore. Par ailleurs dans des essais de panification, nous avons montré l'importance de la durée de fermentation, de l'hydratation de la pâte ainsi que de l'acidification lactique dans la dégradation de l'acide phytique et la solubilisation des minéraux. Enfin pour confirmer les résultats obtenus in vitro, nous avons examiné la disponibilité minérale d'une farine complète incorporée à 70% dans le régime de rongeur et ce sous trois formes : farine sans panification, pain à la levure et pain au levain. La panification au levain permet la meilleure hydrolyse de l'acide phytique, confirmant ainsi les résultats précédents. La fermentescibilité intestinale des différents régimes est semblable, indiquant que la panification n'affecte pas les teneurs en glucides fermentescibles de la farine complète. En revanche, la biodisponibilité des minéraux (Mg, Fe, Zn) du pain au levain est plus élevée que celle de la farine native, du pain à la levure et même régime témoin. Il est donc possible de réaliser un pain complet à forte biodisponibilité minérale par l'amélioration variétale et par une panification au levain bien conduite. Nous avons aussi montré qu'un régime riche en acide phytique (pur ou sous forme de son de blé) induisait une adaptation de la muqueuse intestinale chez le rat, conduisant à une dégradation accrue des phytates ingérés. Les possibilités d'adaptation d'une activité phytasique intestinale chez l'homme mériteraient d'être explorées. Par ailleurs, en induisant des fermentations intestinales qui conduisent à une meilleure assimilation minérale, les fibres céréalières solubles comme l'amidon résistant ou les fructanes peuvent contrecarrer les effets négatifs de l'acide phytique ou de son blé chez le rat. Ainsi l'ingestion de phytates provoque une forte diminution de l'absorption du fer, du zinc et du cuivre alors que l'introduction de 20% d'amidon résistant ou de 10% de fructooligosaccharides stimule l'absorption et atténue les effets négatifs des phytates. L'effet des glucides fermentescibles semble supérieur à celui de l'acide phytique et ceci souligne l'importance de la consommation de fibres fermentescibles pour améliorer la biodisponibilité en minéraux. Les arabinoxylanes et l'amidon résistant peuvent jouer un rôle important pour favoriser l'homéostasie du cholestérol. L'introduction de ces fibres dans les régimes des rats diminue la cholestérolémie et le cholestérol hépatique. Ces glucides agissent en empêchant l'absorption du cholestérol et en augmentant l'élimination des stéroïdes fécaux. En conclusion, ces travaux ont montré qu'il était possible d'améliorer la teneur en minéraux des blés et leur valeur nutritionnelle. Une démarche similaire doit être conduite pour les micronutriments, ce qui permettra d'améliorer considérablement la qualité du pain et son importance dans une optique de nutrition préventive.
Pas de résumé disponible.