Thèse soutenue

Les douze heures noires : la nuit à Paris (1815-1870)

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Auteur / Autrice : Simone Delattre
Direction : Alain Corbin
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance en 1999
Etablissement(s) : Paris 1

Résumé

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S'intéresser au pan nocturne de l'activité parisienne au XIXe siècle conduit à s'interroger sur la portée de la modernité urbaine. Les lumières de la fête et de la prosperité impériales suffisent-elles à abolir l'ombre sociale qui envahissait, dit-on, le Paris d'avant 1848 ? Dans quelle mesure la ville du secret, du labyrinthe, du souterrain s'efface-t-elle derrière celle de l'ostentation éclatante et assainic ? Un rythme de vie spécifique, incluant l'existence permanente d'une "vie nocturne", distingue la capitale de la province des les monarchies censitaires. La prolifération d'un discours littéraire sur les contrastes (agréments et déconvenues, mondanités et bas-fonds) des nuits parisiennes au cours du premier XIXe siècle indique l'affinement de l'attention portée au décor et aux acteurs des heures tardives, le déplacement du clivage vie publique / vie privée. La généralisation de l'éclairage public au gaz facilite, dans le même temps, la continuité des fonctions urbaines entre jour et nuit, et leur rationalisation. Des usages socialement hierarchisés du temps et du territoire citadins se révèlent dans le "contretemps" élégant ou bohème des noctambules. Tandis que se perfectionne le quadrillage policier du Paris central, l'essor de ces déambulations nouvelles relègue dans une obscurité suspecte celles d'individus à l'identité et aux ressources indécises, dont la présence tardive dans les rues les isole comme les membres de supposées "classes dangereuses". La séquence nocturne laisse entrevoir en somme le réagencement des normes temporelles et spatiales qui régissent la vie parisienne du siècle dernier, la transformation conjuguée de l'imaginaire social et des disciplines collectives propres à la grande ville.