Thèse de doctorat en Ethnologie
Sous la direction de Hugo Zemp.
Soutenue en 1995
à Paris 10 .
La musique des funérailles a été abordée sous deux angles principaux. En premier lieu, elle est envisagée comme mode particulier d'expression sociale s'articulant avec d'autres types d'expression (discours, actes spécifiques associes à la présence troublante de la mort) dans un rite funéraire appréhendé comme un langage général, mais dont la portée exacte ne pouvait être cernée qu'en remontant jusqu'aux représentations et aux croyances sur la mort. En second lieu, la musique est étudiée comme production artistique dont l'articulation avec le cycle rituel révèle les liens intimes entre l'art musical et l'art poétique. La recherche du sens du rite funéraire, fondée sur les témoignages anthropologiques antérieurs et sur nos propres observations, permet de dégager l'idée du destin, de la fatalité de la mort ou du désordre social et cosmique cause par ce phénomène sous certaines conditions. Dans ces sociétés, la mort est ressentie différemment selon l’âge des individus. Ainsi, le vieillard qui meurt ne fait que suivre une route qui le mène là ou devient esprit. En revanche, la mort à la fleur de l’âge exprime une anomalie affectant le système social et cosmique. La nature des musiques et leur articulation avec les autres modes d'expression du rite funéraire, déterminent trois catégories musicales s'intégrant dans trois temps du cycle rituel : a) à la veillée mortuaire correspondent les musiques spécifiquement funèbres ; les plus caractéristiques de cette période dans la tradition, ont en commun que les textes des chants sont en relation directe avec le phénomène de la mort ; b) à la période de veuvage s'insèrent des musiques de divination liées a la recherche de la cause du décès; c) à la levée du deuil correspondent des musiques de commémoration du décès. La thématique de ces musiques s7accorde avec les préoccupations quotidiennes de la vie. L'étude de la pensée sur la mort et des rites funéraires est indispensable pour comprendre le rôle de ces musiques; inversement, l'analyse de certains aspects de l'art musical éclaircit la pensée et le déroulement du rituel.
Music and funeral rites among the Zande and the Nzakara of the Central African Republic
In this study, funeral music has been treated in two principal categories. In the first place, music is envisaged as a particular mode of social expression, articulating with other types of expression (speeches, specific acts associated with troublesome presence of death) in funeral rites that are understood as a general language. However, the exact implications of this could be understood by examining local representations and beliefs about death. Secondly, music is studied as an artistic production whose ritual cycle reveals very close relations between musical and poetic art. This inquiry into the sense of funeral rites, based on previous anthropological works and on our own observations permits us to bring out the idea of destiny, of the fatality of delats or of social and cosmic disorder caused by this phenomenon under certain conditions. In these societies, people’s feeling about death is influenced by age. Whereas the death of an old man is seen as a process leading him to join the world of spirits, that of a young person is expressed as an anomaly that affects the social and cosmic system. The nature of musical repertories and their links with other expressive means of funeral rites defines three categories of music that are integrated into three episodes of ritual cycle: a) during vigil, music is specifically associated with funerals. These are common texts directly related to death; b) during widowhood, are found divinatory musical repertories associated with the search for the causes of death, c) at the end of mourning, music repertories commemorate the dead. The texts of these deal with daily preoccupations. The study of thoughts about death and funeral rites is indispensable to understand the role played by this music. Inversely, analysis of certain aspects of musical art enlightens our reflexions on and succession of rituals.