Thèse en cours

L'apport du contrôle concret dans la protection des droits et libertés : Recherche en droit public interne

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Auteur / Autrice : Thomas Escach-Dubourg
Direction : Xavier Bioy
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Droit
Date : Inscription en doctorat le 01/10/2017
Etablissement(s) : Toulouse 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Droit et Science Politique
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : IMH - Institut Maurice Hauriou

Résumé

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Depuis quelque temps se fait jour, dans les prétoires nationaux et dans la doctrine française, un véritable phénomène de « concrétisation » du contrôle juridictionnel. Si le juge judiciaire – sous l'influence du juge européen – a largement alimenté ce processus, notamment depuis son fameux arrêt du 4 décembre 2013, le juge administratif a en réalité donné un nouvel élan à celui-ci – en témoigne la position de la Cour de cassation le 9 novembre 2016. Effectivement, dans un arrêt symbolique en date du 31 mai 2016, le Conseil d'État a tenu à clarifier et développer précisément la position que se doivent d'adopter les différents juges de l'ordre administratif en matière de protection des droits et libertés. La singularité de cette position tient au développement puissant, et surprenant, d'un étage dit concret, car se fondant explicitement et fondamentalement sur les circonstances de l'espèce, postérieur à un étage qualifié d'abstrait puisqu'il s'interroge sur la conventionnalité de la norme législative indépendamment d'un contexte propre à l'espèce jugée. Au bout du compte, ces éléments permettent de révéler plusieurs choses. Premièrement, ils ramènent sur le devant de la scène une notion fondamentale, mais aussi particulièrement obscure, de la matière juridique : celle de « contrôle concret ». De nombreuses contributions se sont déjà intéressées à ce que signifiait et impliquait cette notion, au demeurant largement façonnée par le discours doctrinal, ainsi que les ambiguïtés qui l'entourent. Pour dire vrai, cette notion est, depuis trop longtemps maintenant, une arène dans laquelle se disputent divers acteurs qui confrontent leur lecture à la fois procédurale, substantielle ou encore organisationnelle de cette notion. Nous le comprenons aussi, la distinction du caractère concret-abstrait du contrôle développé par les juges semble échapper à toute tentative de description rigoureuse. La conceptualiser et la redéfinir est donc un enjeu en soi – car elle permet d'envisager des choses importantes ; d'autant que ces termes disposent d'un « passif », ils constituent souvent un passage obligatoire dans certaines disciplines extrajuridiques –, qui n'est plus incommensurable dès lors que le juge administratif donne de nouvelles clés de lecture qui participent, certainement, à trancher le débat. Deuxièmement, l'émergence et la démocratisation progressive d'un contrôle concret démontrent toute l'importance que revêt celui-ci dans l'étude de l'organisation et de la manifestation de la sauvegarde des droits et libertés. En d'autres mots, cette étude pourra préciser le régime juridique qui est associé, plus ou moins uniformément, à la « fondamentalité » – et donc trancher sur ce qu'elle suppose en Droit. Si ce premier se caractérise par la puissance du pouvoir juridictionnel et le contrôle de proportionnalité, il se caractérise aussi, et dorénavant, par un raisonnement agencé autour de l'élément factuel. Ce qui n'est pas toujours évident dans un domaine qui répudie leur présence. Dans le même temps, un tel contrôle peut donner le sentiment d'une décision marquée par l'équité plus que par la rationalité juridique. Il convient ainsi de revenir sur tout cela, pour au final, insister sur l'existence d'une méthode de contrôle qui serait propre aux droits et libertés, au moins en droit public interne, et qui serait – ou qui devrait être – surtout partagée par tous les juges. Troisièmement, aborder cette thématique, c'est aussi s'interroger sur les mutations probables dans le cadre du contentieux constitutionnel. La proximité certaine entre le juge administratif et le juge constitutionnel laisse subodorer une éventuelle circulation des modes de raisonnement, malgré les crispations classiques du Conseil constitutionnel. Quelques évolutions ont pu déjà être notées ou, plus précisément, envisagées par la doctrine constitutionnaliste. Néanmoins, il est certain que la banalisation d'un tel contrôle concret – et dont la pertinence a été démontrée – dans les moindres endroits du contentieux administratif conduira le juge constitutionnel à faire évoluer son fonctionnement en raison de l'interaction permanente entre ces juridictions, notamment sur le terrain des arrêts de renvoi dans le cadre du contrôle QPC. La concrétisation de la réflexion du juge administratif, couplée à la radicalité de la lecture des conditions de renvoi d'une QPC, sera de nature à entraîner l'acceptation de la concrétisation du contrôle de constitutionnalité des lois en matière de droits et de libertés, déjà revendiquée par la doctrine. Mais cela ne se fera certainement pas sans mal et sans réflexion sur ce qui fonde la justice constitutionnelle.