Thèse soutenue

"Les remontées des gouffres de l'absence" : résistance et désoeuvrement dans le cinéma de Philippe Garrel

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Auteur / Autrice : Thibault Grasshoff
Direction : Thierry Millet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Arts
Date : Soutenance le 08/04/2022
Etablissement(s) : Aix-Marseille
Ecole(s) doctorale(s) : Ecole doctorale Langues, Lettres et Arts (Aix-en-Provence ; 2000-....)
Jury : Président / Présidente : Antony Fiant
Examinateurs / Examinatrices : Nicole Brenez
Rapporteurs / Rapporteuses : Didier Coureau

Résumé

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La fin des années 1970 marque un tournant majeur dans la filmographie de Philippe Garrel. Sa visée radicalement poétique, sa posture d'artiste marginal avaient su faire de son cinéma un lieu de quiétude préservé du monde. Mais l’oeuvre se voyait alors dépassée par les puissances artistiquement intrépides qu'elle mettait en jeu : la précarité, la fatigue, l'immobilisation, qui participent du désoeuvrement. À partir de L'Enfant secret (1979) s'amorce une transition instable vers des formes plus rassurantes soutenues par la narration. Le cinéaste tente d'ordonner les expériences éparses, de contenir ce « mouvement trop fort du devenir poétique » (Blanchot) qui avait fécondé certaines de ses oeuvres les plus admirables : La Cicatrice intérieure (1972), Les Hautes solitudes (1974). Cette étude, qui portera sur l'ensemble de la filmographie, soutiendra le propos suivant : si l'on dépasse le constat d'une simple résurrection, on observe que les puissances originaires de cette esthétique survivent et insistent d'autant plus dans les périodes ultérieures. Elles menacent de dissoudre l'unité de l’oeuvre dans le fragmentaire. Sous leur influence l'oeuvre se hérisse. Son épaisseur intransitive résiste aux attentes du spectateur, en même temps qu'elle neutralise le témoignage personnel de l'auteur. Le cinéma de Garrel demeurera fiévreux, troué par l'absence et le mutisme prêts à regagner du terrain, altéré par l'impuissance à rassembler, la réflexivité, la discontinuité, la répétition. Nous penserons le désoeuvrement et sa résistance comme une telle part de danger attachée aux profondeurs de la création, plus proche en cela de l'ascétisme artistique que de l'oisiveté.