Thèse soutenue

La forme financiarisée de la relation de crédit des collectivités locales françaises. De la crise à l'institutionnalisation.

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Auteur / Autrice : Edoardo Ferlazzo
Direction : Ève Chiapello
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Economie des institutions
Date : Soutenance le 30/11/2018
Etablissement(s) : Paris Sciences et Lettres (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales
Partenaire(s) de recherche : établissement de préparation de la thèse : École des hautes études en sciences sociales (Paris ; 1975-....)
Jury : Président / Présidente : Antoine Rebérioux
Examinateurs / Examinatrices : Antoine Rebérioux, Patrick Le Lidec, Benjamin Lemoine, Laurence Scialom, Stéphanie Serve, Yamina Leila Tadjeddine

Résumé

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La thèse porte sur les évolutions de la relation de crédit des collectivités locales et étudie différentes formes que celle-ci a pu prendre au cours du temps. Tout particulièrement, sur la période récente, nous mettons en évidence l’émergence et l’institutionnalisation de ce que nous identifions comme une « forme financiarisée », caractérisée par l’utilisation de produits financiers distribués sur les marchés financiers dans la gestion de dette des collectivités locales. Nous développons une approche institutionnaliste où la relation de crédit, et ses transformations historiques, sont saisies à partir des régulations qui encadrent, de manière plus ou moins lâche, la demande de crédit émanant des collectivités locales, d’une part, et l’offre de crédit des acteurs financiers, d’autre part. Nous cherchons notamment à rendre compte de la manière dont les interactions entre demande et offre de crédit sont conditionnées et en partie déterminées au niveau institutionnel. Deux types de pratiques d’emprunts que nous qualifions de financiarisés sont au centre de ce travail : l’emprunt structuré et l’emprunt obligataire. Nous suivons le développement à partir des années 1990 des produits structurés qui seront au centre de la crise des emprunts dits « toxiques », ainsi que les formes de gestion puis de sortie de cette crise (2004-2015). Sur la même période, des émissions obligataires groupées de collectivités locales sont développées et vont déboucher sur la création de l’Agence France Locale (AFL), dont nous suivons la structuration (2004-2018). Nous montrons que la période d’incertitude qui s’ouvre à compter de la crise financière de 2008 contribue paradoxalement à la poursuite et l’institutionnalisation du recours, pour les collectivités locales, à des produits faisant appel aux marchés et investisseurs financiers. Ce résultat n’était pas écrit dans la mesure où la crise des emprunts toxiques nourrit une vive critique d’une forme financiarisée qui s’était développée « par le bas » dans un contexte de libéralisation financière pour le prêt aux collectivités locales et de décentralisation. Le moment de réflexion institutionnelle, qui s’ouvre avec la crise, conduit les acteurs à tenter de dissocier la « mauvaise » finance de la « bonne » pour mieux pouvoir continuer à recourir à des formes d’emprunt financiarisées. L’enquête par entretiens (n= 61) et la collecte d’une abondante littérature grise se sont organisées principalement autour du décryptage des outils de gestion, dispositifs de gestion de crise et réglementations qui structurent la relation de crédit. Nous les décodons sous l’angle des conventions qu’ils incorporent et des présupposés qu’ils rendent légitimes, ce qui nous permet d’en souligner les effets de sélection et de disciplinarisation. En ce qui concerne l’emprunt structuré, ce travail est complété par une analyse statistique et économétrique portant sur les communes « intoxiquées » et permettant de discuter des déterminants du développement du recours à ce type d’emprunt.