Thèse soutenue

Santé et insécurité routière : influence de la consommation de médicaments (Étude CESIR-A)

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Auteur / Autrice : Ludivine Orriols
Direction : Emmanuel Lagarde
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences, technologie, santé. Epidémiologie et santé publique
Date : Soutenance le 27/09/2010
Etablissement(s) : Bordeaux 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la vie et de la santé (Bordeaux)
Jury : Président / Présidente : Mathieu Molimard
Examinateurs / Examinatrices : Junaid Abdul Razzak
Rapporteurs / Rapporteuses : Christian Riché, Maryse Lapeyre-Mestre

Mots clés

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Résumé

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La prise de conscience de l’implication des médicaments dans la genèse des accidents de la route date d’une vingtaine d’années. Les médicaments psycho-actifs peuvent altérer les capacités de conduite par leur action sur le système nerveux (par exemple, un effet sédatif le lendemain d’une prise d’hypnotique). D’autres médicaments sont susceptibles d’affecter les fonctions psychomotrices par leur action sur les fonctions physiologiques (tel que les hypoglycémies liées à un traitement antidiabétique). L’étude CESIR-A a été mise en place pour contribuer à la connaissance du lien épidémiologique entre médicaments et accidents de la route. L’étude utilise trois bases de données françaises : le Système National d’Information Inter-Régimes de l’Assurance Maladie (SNIIR-AM), les Procès Verbaux d’accidents (PV) et les Bulletins d’Analyse des Accidents Corporels de la circulation (BAAC). L’appariement de ces données a conduit à l’inclusion de 72,685 conducteurs impliqués dans un accident corporel sur la période juillet 2005-mai 2008. L’analyse a été réalisée grâce à deux méthodes: une analyse cas-témoin comparant les responsables aux non-responsables des accidents et une analyse dite en case-crossover. Les périodes d’exposition aux médicaments ont été estimées à partir des dates de délivrances de médicaments prescrits, puis remboursés par l’assurance maladie. L’étude des médicaments regroupés selon les quatre niveaux de risque sur la conduite définis par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSAPS) [du niveau 0 (pas de risque) au niveau 3 (risque élevé)], a montré que les utilisateurs de médicaments prescrits de niveau 2 et de niveau 3 ont un risque significativement plus élevé d’être responsables de leur accident (OR=1,31 [1,24-1,40] et OR=1,25 [1,12-1,40], respectivement). La fraction de risque attribuable à l’utilisation de ces médicaments était de 3,3% [2,7%-3,9%]. Le risque d’être responsable d’un accident était augmenté chez les utilisateurs de zolpidem (OR=1,28 [1,07-1,53]) mais pas chez les utilisateurs de zopiclone ou de benzodiazépines hypnotiques. Plus particulièrement, ce risque était augmenté chez les 139 conducteurs ayant eu plus d’un comprimé de zolpidem délivré par jour au cours des cinq mois précédant l’accident (OR=2,38 [1,61-3,52]). L’analyse case-crossover a mis en évidence un sur-risque d’accident de la route chez les utilisateurs de benzodiazépines hypnotiques seulement (OR=1,42 [1,09-1,85]). Les conducteurs exposés aux hypnotiques partagent les mêmes caractéristiques au regard du type d’accident, qui survenaient plus fréquemment sur autoroute. Dans notre base de données, 196 conducteurs ont été exposés à la buprénorphine et/ou à la méthadone, le jour de leur accident. Cette population spécifique était jeune, essentiellement masculine, avec d’importantes co-consommations, notamment d’alcool de médicaments de niveau 3. Les conducteurs exposés à la buprénorphine et/ou à la méthadone présentaient un risque accru d’être responsables de leur accident (OR= 2,19 [1,51-3,16]). Notre étude fournit des informations importantes sur la contribution des médicaments au risque d’accident de la route. D’après nos résultats, la classification de l’AFSSAPS semble appropriée concernant les médicaments de niveaux 2 et 3. Les sur-risques d’être responsable d’un accident chez les exposés au zolpidem ou aux traitements de substitution pourraient être liés, au moins en partie, au comportement à risque de ces conducteurs. L’amélioration du comportement des conducteurs représente un des défis pour la sécurité routière. L’objectif de la classification française et de la signalétique apposée sur les boîtes de médicaments est donc de fournir aux patients une information appropriée sur les effets des médicaments sur leur capacité de conduite.