Thèse soutenue

Au chevet de la Nation : sexe, race et médecine : XVIIe-XVIIe siècles

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Elsa Dorlin
Direction : Pierre-François Moreau
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Philosophie
Date : Soutenance en 2004
Etablissement(s) : Paris 4

Résumé

FR  |  
EN

Pour les médecins du 17e s. , les femmes ont un tempérament froid et humide, imparfait et maladif. Hystérie, nymphomanie, ischurie. . . , cette étiologie sexuée constitue l'objet ambigu des nombreux traités des Maladies des femmes. Ce corpus est un champ d'investigation précieux pour analyser la façon dont les catégories du sain et du malsain se constituent comme catégories de pouvoir. Cette conception du corps des femmes comme un corps pathogène justifie une inégalité naturelle entre les sexes. Les naturalistes prennent modèle sur la domination de genre : les Indiens ou les Africains, sont perçus comme des populations au tempérament efféminé et faible. Le tempérament devient un instrument de naturalisation et de racialisation des rapports sociaux. Au 18e s. , le souci de la santé, la crainte du dépeuplement poussent les médecins à définir un concept de santé féminine pour promouvoir le modèle d'une femme saine et vigoureuse, mère des enfants d'une Nation forte. La mère devient le type féminin de la santé, opposé aux figures d'une féminité mutante ou " dégénérée ", la vaporeuse, la vivandière hommasse, la prostituée, l'esclave. La prise de contrôle de l'univers de la naissance par les autorités permet d'écarter les sages-femmes et les nourrices. Dans les colonies, cette nouvelle gestion de la reproduction est cruciale pour le système plantocratique. Les épouses transmettent par leur lait leur tempérament vigoureux à leurs enfants, quelques soient les influences du climat. Garantes de l'intégrité des caractères nationaux, de la supériorité des "blancs" sur les "noirs", elles deviennent ainsi un modèle et une arme pour la régénération de la Nation et l'unité du peuple français.