Thèse soutenue

Le STO à hauteur d'homme : Des Ornais en Allemagne (1942-1945)

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Auteur / Autrice : Sébastien Beuchet
Direction : François Rouquet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire, histoire de l'art et archéologie
Date : Soutenance le 19/09/2023
Etablissement(s) : Normandie
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Normandie Humanités (Mont-Saint-Aignan, Seine-Maritime)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Histoire, Territoires & Mémoires (Caen ; 2017-....)
établissement co-accrédité : Université de Caen Normandie (1971-....)
Jury : Président / Présidente : Anne Simonin
Examinateurs / Examinatrices : Fabrice Grenard, Helga Bories, Camille Fauroux
Rapporteurs / Rapporteuses : Fabrice Grenard, Helga Bories

Résumé

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Plus de 3 200 Ornais rejoignent sous la contrainte entre septembre 1942 et juin 1944 les quelques 600 000 à 650 000 Français requis pour le travail obligatoire en Allemagne. Ce phénomène social de masse, longtemps ignoré des historiens, a profondément bouleversé la société française et impacté les territoires. À partir de l’exemple ornais, département marqué par sa ruralité et sa faible industrialisation, nous avons démontré la distorsion entre les politiques nationales de réquisition des travailleurs forcés pour le Reich impulsées d’en haut et les réalités de leurs perceptions et réceptions par ceux qui sont chargés de leur application sur le terrain. Comment ces acteurs transposent-ils cette politique malgré les particularismes locaux ? Quelle part d’autonomie conservent-ils face aux pressions de l’occupant et aux injonctions de la préfecture régionale ? Comment les recrutements massifs de travailleurs fragilisent-ils l’économie départementale et divisent-ils le corps social avant de susciter résiliences et oppositions ?À partir de l’exploitation d’un corpus de témoignages d’anciens requis, notre thèse porte sur l’expérience vécue de travailleur forcé en Allemagne « vue d’en bas » et au quotidien (travail, logement, alimentation, temps libre…), les relations avec les autres Français présents en Allemagne et avec les travailleurs étrangers au camp ou à l’usine. Les relations complexes avec le peuple ennemi, les multiples formes oppositions et leur répression ne sont pas oubliées. Nos analyses s’affranchissent des limites chronologiques de l’unique période d’exil outre-Rhin. Les prémices du départ (recensement, convocation), les questions du consentement ou du non-consentement, le voyage et l’arrivée des requis jusqu’à leur lieu d’exil sont au cœur de nos recherches. Les différentes formes de la libération des STO, leur rapatriement d’Allemagne et leur réinsertion professionnelle, sociale et familiale sont également analysées.La construction du récit de cette expérience intime constitue le fil directeur de notre thèse. Son étude montre que les mémoires individuelles du STO sont des mémoires « rhizome » qui se nourrissent du récit collectif forgé dès 1945 par la puissante Fédération des Déportés du Travail (FNDT) tout en prenant une certaine distance, parfois critique, avec cette mémoire communautaire et militante. Les traces du STO, parfois fugaces, dans les mémoires familiales révèlent la difficile transmission intergénérationnelle du vécu de ces hommes, source d’oubli et/ou de souvenirs reconstruits.