Thèse soutenue

Influence de la couverture détritique sur le bilan de masse des glaciers des Hautes Montagnes d’Asie : une approche multi-échelle

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Auteur / Autrice : Fanny Brun
Direction : Patrick WagnonEtienne Berthier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de la Terre et de l'Univers et de l'Environnement
Date : Soutenance le 10/09/2018
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la terre, de l’environnement et des planètes (Grenoble ; 199.-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des géosciences de l'environnement (Grenoble)
Jury : Président / Présidente : Delphine Six
Examinateurs / Examinatrices : Ann Rowan, Laurent Longuevergne
Rapporteurs / Rapporteuses : Matthias Huss, Lindsey Nicholson

Mots clés

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Résumé

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Les Hautes Montagnes d’Asie (HMA) abritent la plus grande superficie de glaciers en dehors des régions polaires. Environ 15 % des ~100 000 km² de glaciers des HMA sont couverts de débris d’épaisseur variable. L’influence de cette couverture détritique sur la réponse des glaciers au changement climatique reste méconnue. Au-delà d’une épaisseur critique (quelques cm), les débris protègent les glaciers de la fonte par effet isolant. Mais ces glaciers présentent des structures qui pourraient sensiblement accentuer leur fonte : en surface ce sont les falaises où la glace est à nue et les lacs supra-glaciaires, alors qu’au cœur des glaciers c’est leur réseau hydrologique intra-glaciaire complexe. L’objectif de cette thèse est d’évaluer l’influence de la couverture détritique sur le bilan de masse des glaciers des HMA. Jusqu’à présent, cette influence a été évaluée à partir de changements de longueurs ou sur des échantillons de glaciers restreints, et aucune étude n’a quantifié l’influence de la couverture détritique sur le bilan de masse des glaciers à grande échelle.Nous avons d’abord traité plus de 50 000 couples stéréoscopiques du capteur ASTER (Advanced Spaceborne Thermal Emission and Reflection Radiometer) pour dériver des modèles numériques de terrain (MNTs) sur la quasi-totalité des glaciers des HMA. Nous avons mesuré ainsi le bilan de masse régional entre 2000 et 2016 avec une résolution jamais atteinte auparavant. La perte totale est de 16.3 ± 3.5 Gt a-1 soit un bilan de masse moyen de -0.18 ± 0.04 m équivalent (éq.) eau a-1, très variable spatialement, avec une perte de masse record pour le Nyainqentanglha (-0.62 ± 0.23 m éq. eau a-1) et un léger gain pour le Kunlun (+0.14 ± 0.08 m éq. eau a-1).Cette variabilité spatiale des bilans de masse reflète au premier ordre la variabilité des climats, différents d’un bout à l’autre des HMA. Pour s’en affranchir, nous avons découpé cette région en 12 sous-régions supposées homogènes climatiquement, où nous avons étudié l’influence de la couverture détritique sur le bilan de masse des glaciers de plus de 2 km² (>6 500 glaciers soit 54 % de la surface englacée totale). Statistiquement, la couverture de débris n’est pas un bon prédicteur du bilan de masse. Dans quatre sous-régions, les glaciers couverts ont des bilans de masse plus négatifs que les glaciers blancs, c’est l’opposé dans le Tien Shan alors que pour les sept sous-régions restantes, les bilans ne sont pas différents statistiquement entre glaciers blancs et couverts. Souvent, la couverture détritique a une influence plus faible que la pente de la langue ou l’altitude moyenne du glacier, car les langues couvertes de débris descendent plus bas en altitude, là où l’ablation est la plus forte.Ce type d’étude statistique est intéressant pour se forger une intuition, mais reste peu informatif en termes de compréhension des processus glaciologiques. Pour mieux contraindre les contributions des processus responsables de la fonte, nous avons travaillé en parallèle à une échelle plus fine en nous intéressant au glacier du Changri Nup (2.7 km²) situé non loin de l’Everest au Népal. A partir de MNTs haute résolution dérivés d’images des satellites Pléiades ou acquises avec un drone, nous avons montré que les falaises de glace, bien qu’elles n’occupent que 7 à 8 % de la surface de la langue de ce glacier, ont contribué à ~23 ± 5 % de l’ablation nette totale au cours de deux années contrastées. Ces falaises sont donc des zones d’ablation préférentielle mais couvrent des surfaces trop faibles pour compenser la réduction d’ablation induite par la couverture détritique environnante. Si l’on observe des taux d’amincissement similaires sur les langues couvertes ou non de débris, c’est que la vitesse d’émergence est plus faible sur les langues couvertes ce qui compense un bilan de masse de surface moins négatif que sur les glaciers blancs. Il est néanmoins nécessaire de mieux comprendre la dynamique des langues couvertes de débris.