Thèse soutenue

Le clinopyroxène alumineux : la mémoire chimique du manteau supérieur lithosphérique

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Auteur / Autrice : Violaine Sautter
Direction : Olivier Jaoul
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Terre, Océan, Espace
Date : Soutenance en 1989
Etablissement(s) : Paris 11

Mots clés

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Mots clés libres

Résumé

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Les zonations minérales sont extrêmement rares dans les assemblages du manteau supérieur lithosphérique. Il s'agit en effet de domaine de haute-température où la diffusion est efficace. Le clinopyroxène, un des constituants essentiels des éclogites, peut cependant montrer des gradients de concentration important des éléments Al-Si-Mg. Ceci a été observé dans un xénolithe d'éclogite issu du pipe kimberlitique de Roberts Victor en Afrique du Sud ainsi que dans un lit de Webstérite à grenat dans des écailles de péridotites alpines (Freychinède Pyrénées française). Dans les deux cas ces hétérogénéités de composition dans le clinopyroxène sont associées à des exsolutions de grenat et reflètent un refroidissement isobare à partir de températures initialement élevées (1400-1300°C). Des expériences de diffusion effectuées en laboratoire sur la paire dioside - molécule de Tschermak ont montré que l'interdiffusion des éléments Al-Si était très lente. Il a fallu en effet mettre en œuvre des techniques de microanalyse nucléaire au pouvoir de résolution spatiale suffisamment fin pour que des profils de diffusion de l'ordre de la centaine d'angstrom puissent être mesurés. Le coefficient obtenu grâce à l'utilisation de la réaction nucléaire résonante 27 Al(p,ϒ,)28Si est le suivant D(cm2/s) = 1. 4 10 -7 exp(64/RT). Il s'agit jusqu'à présent du plus petit coefficient mesuré dans les clinopyroxènes. La lenteur de diffusion de l'aluminium expliquerait donc pourquoi, même à haute température, l'exsolution du grenat impliquant un transfert Al-Si est bloquée en cours d'évolution. Ces données de diffusion étant connues, il est alors possible par l'intermédiaire de modèles, d'accéder aux conditions de refroidissement de la roche hôte à partir de la forme des gradients de concentrations préservés dans le pyroxène. Dans le xénolithe éclogitique comme dans le lit de pyroxénite, il a ainsi été possible de montrer que le refroidissement se faisait au moins en deux étapes : une première rapide de l'ordre de 400°C/My suivie d'une seconde beaucoup plus lente entre 40 et 4°C/My. De telles conditions indiquent que les roches se sont refroidies à partir d'un liquide. La mémoire chimique du manteau supérieur lithosphérique serait ainsi le clinopyroxène alumineux et non le grenat pour les raisons suivantes :-les solutions solides impliquant les espèces tétraédriques dont la diffusion est très lente sont uniquement possibles dans le clinopyroxène. Par conséquent la migration de Al et de Si peut donner lieu à des gradients de concentrations mesurables alors que dans le grenat ces deux espèces ont leur concentration fixée par la stoechiométrie du minéral. -le clinopyroxène dans lequel l'aluminium est à la fois octaédrique et tétraédrique est un minéral ubiquiste qui centralise les transferts d'aluminium. Le grenat au contraire dont l'aluminium est restreint aux sites octaédriques n'est stable qu'à haute pression. Dans l'asthénosphère par contre les travaux expérimentaux ont montré que le pyroxène se dissolvait progressivement dans le grenat au-delà de 100 kbar. Ces mêmes grenats remontés aux profondeurs d'échantillonnage moyen d'une kimberlite (200km) devraient montrer en sens inverse des exsolutions de pyroxènes. Des grenatites remontées par le pipe de Jagersfontain en Afrique du sud montrent de telles figures. Il s'agirait des roches les plus profondes actuellement observables en surface faisant du grenat la mémoire possible de l'asthénosphère.