Thèse soutenue

La fertilisation soufrée est-elle un levier efficace pour limiter le transfert sol-grain du Cd chez le blé dur ?

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Auteur / Autrice : Agathe Vidal
Direction : Christophe NguyenJean-Yves Cornu
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Géochimie et écotoxicologie
Date : Soutenance le 18/12/2024
Etablissement(s) : Bordeaux
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences et Environnements (Talence, Gironde ; 1999-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Interactions sol plante atmosphère (INRA Bordeaux-Aquitaine)
Jury : Président / Présidente : Camille Dumat
Examinateurs / Examinatrices : Matthias Wiggenhauser, Catherine Sirguey
Rapporteurs / Rapporteuses : Christophe Salon

Résumé

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Le cadmium (Cd) est un élément métallique non essentiel et très toxique, présent généralement à l’état de trace dans les sols. Son origine est naturelle en lien avec la pédogenèse mais aussi anthropique (contamination des intrants agricoles rejets industriels etc.). En prélevant le Cd du sol par leurs racines, les plantes accumulent ce contaminant dans leurs parties aériennes, menaçant ainsi la qualité sanitaire des denrées alimentaires. C’est le cas du blé dur, qui est la céréale accumulant le plus fortement le Cd dans ses grains et qui contribue fortement à l’exposition chronique de la population française au Cd par voie alimentaire. Compte-tenu de la forte toxicité pour l’Homme de ce métal classé cancérogène et reconnu pour ses effets délétères sur les reins notamment, l’Union Européenne a établi des seuils réglementaires fixant les teneurs maximales du Cd dans un grand nombre de denrées alimentaires. Suite à de récentes études toxicologiques, les seuils réglementaires se multiplient et se durcissent. Pour les grains de blé dur, le seuil a récemment été abaissé de 0.20 mg Cd kg-1 à 0.18 mg Cd kg-1 (CE 915/2023). D’autres baisses seront probablement mises en application à l’avenir, ce qui nécessite de trouver des leviers pour limiter le transfert sol-grain du Cd. Le Cd a une forte affinité chimique pour le soufre (S) avec lequel il forme des complexes très stables dans le cas des groupements thiols (-SH) des molécules organiques, plus labiles dans le cas des sulfates. La littérature montre que l’apport de S au sol peut modifier la phytodisponibilité du Cd du sol et affecter la répartition entre organes, les complexes Cd-ligand soufrés contribuant à détoxifier ce métal en le séquestrant dans les vacuoles, notamment dans les racines. Cependant, la littérature concerne majoritairement les sols pollués et la phytoextraction. Peu de travaux portent sur les sols agricoles faiblement contaminés. Ce travail de thèse avait pour objectif de tester si l’apport de S à des doses et formes chimiques utilisées en céréaliculture pouvait limiter l’accumulation de Cd dans les grains de blé dur dans le contexte des sols agricoles. Nous avons montré, en conditions contrôlées, que la solubilité du Cd pouvait être augmentée par l’apport de sulfate d’ammonium, non pas par l’effet direct des sulfates mais par l’effet d’acidification résultant de la nitrification de l’ammonium. En conditions contrôlées et au champ, les apports de S ont légèrement diminué la concentration en Cd dans les grains de blé dur parfois en lien avec une plus forte rétention racinaire du Cd comme attendu. Nous avons observé que le Cd était majoritairement stocké dans les racines et, aux stades reproducteurs, qu’il était remobilisé vers les parties aériennes en même temps que le S. En réduisant la remobilisation du S à partir des racines, la fertilisation soufrée pourrait contribuer à également limiter la remobilisation du Cd des racines vers les grains. Par ailleurs, nos résultats ont montré que la fertilisation S pouvait également affecter la distribution de la biomasse entre les organes, affectant ainsi leur teneur en Cd. Nos travaux suggèrent donc que chez le blé dur, veiller à satisfaire les besoins en S des plantes permettrait de réduire légèrement la teneur en Cd des grains indirectement par des effets sur la biomasse et aussi peut être par des mécanismes directs d’interactions S-Cd. Même s’il n’est pas majeur, le levier de la fertilisation soufrée mérite d’être considéré pour réduire la contamination cadmiée du blé dur.