Stéatopathie métabolique et carcinome hépatocellulaire : prédiction de la carcinogenèse à la réponse au traitement par profilage protéomique
Auteur / Autrice : | Adèle Delamarre |
Direction : | Victor de Ledinghen |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Biologie du cancer |
Date : | Soutenance le 23/09/2024 |
Etablissement(s) : | Bordeaux |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences de la vie et de la santé (Talence, Gironde ; 1993-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut d'oncologie de Bordeaux (2022-....) |
Jury : | Président / Présidente : Valérie Paradis |
Examinateurs / Examinatrices : Marie-Clotilde Alves-Guerra, Jean-Marie Péron | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Marie-Clotilde Alves-Guerra, Jean-Marie Péron |
Résumé
La stéatohépatite liée à une dysfonction métabolique (MASH) représente jusqu’à 35% des carcinomes hépatocellulaires (CHC) dans le monde et constitue la première cause de transplantation pour CHC aux États-Unis. Contrairement à d'autres étiologies, un tiers des CHC liés à la MASH se développent sur un foie non cirrhotique, échappant ainsi aux recommandations de dépistage réservées aux patients cirrhotiques, et conduisant à un diagnostic tardif et un pronostic défavorable. Le dépistage systématique est irréalisable en raison du nombre élevé de patients et il n'existe aucun marqueur prédictif de transformation tumorale. De plus, en cas de CHC avancé, les seules options disponibles sont les thérapies systémiques palliatives. Après des années de monothérapie par sorafénib, l'association atezolizumab/bevacizumab, combinant immunothérapie et antiangiogénique, est désormais recommandée en première ligne. Cependant, le taux de réponse reste limité à 30%, peu de patients accèdent à une deuxième ligne de traitement et il n'existe à ce jour aucun facteur prédictif de réponse. Le profilage protéomique tissulaire par spectrométrie de masse est une approche globale et sans a priori adaptée à ces problématiques complexes. Elle a permis à notre équipe d’identifier une signature prédictive de la non réponse à l’atezolizumab/bevacizumab associée à un shift métabolique.Au cours de ma thèse, mon premier but était d’identifier une signature protéomique prédictive du CHC sur foie MASH et d’étudier les voies de carcinogenèse mises en évidence. Le second but était de valider dans un modèle cellulaire 3D l’implication de la diminution du métabolisme oxydatif dans la résistance à l’atezolizumab/bevacizumab.Premièrement, nous avons mené une étude rétrospective sur biopsies hépatiques de 20 patients atteints de MASH : 11 patients ayant développé un CHC dans les 15 ans suivant leur biopsie initiale (groupe 1, avec une médiane entre la biopsie et le CHC de 7,70 ans) et 9 patients contrôles (groupe 2). Les patients étaient comparables sur les plans clinique et histologique. Nous avons obtenu une signature protéomique de prédiction du CHC de 330 protéines significativement dérégulées et permettant de séparer les deux groupes. Une cohorte de 13 nouveaux patients a permis de valider cette signature protéomique. Parmi ces 330 protéines, la prothymosine alpha (PTMA) était significativement surexprimée dans le groupe 1 avec le plus fort ratio entre les deux groupes. PTMA est surexprimée dans de nombreux cancers dont le CHC et impliquée dans des voies de prolifération cellulaire et de résistance à l’apoptose, ce qui en fait un candidat pertinent. La validation fonctionnelle de PTMA est en cours dans un modèle cellulaire de MASH.Deuxièmement, nous avons mis au point un modèle d’infiltration immunitaire au sein d’un sphéroïde de CHC puis mimé le shift métabolique des patients non répondeurs de façon pharmacologique par un inhibiteur de la chaine respiratoire mitochondriale. Nous avons montré une diminution de l’infiltrat immunitaire dans les sphéroïdes traités, ce qui peut participer à une moindre efficacité de l’immunothérapie chez ces patients.Notre signature protéomique apporte des résultats prometteurs sur la prédiction du CHC sur foie MASH, soulignant une possible implication précoce de la protéine PTMA. L’exploration du rôle de PTMA et des autres cibles identifiées pourra ouvrir des pistes de prévention du développement tumoral. Une validation externe de cette signature sur une plus large cohorte sera nécessaire avant un transfert à la clinique, dans le but d’optimiser le dépistage du CHC chez les patients atteints de MASH. La deuxième partie de cette thèse identifie un mécanisme de résistance du CHC à l’atezolizumab/bevacizumab. Cette approche pourra être étendue à l’ensemble des traitements de première ligne du CHC ouvrant ainsi la voie à une médecine personnalisée et à des pistes de recherche visant à améliorer l’efficacité des traitements.