Thèse soutenue

Y'a pas de suie sans feu ! : étude micro-chronologique des concrétions fuligineuses. Étude de cas : le site paléolithique de la Grotte Mandrin (France)

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Ségolène Vandevelde
Direction : Christophe Petit
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Archéologie. Anthropologie. Préhistoire
Date : Soutenance le 04/11/2019
Etablissement(s) : Paris 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Archéologie (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Archéologies et sciences de l'Antiquité (Nanterre ; 1999-....)
Jury : Président / Présidente : Jean-Michel Geneste
Examinateurs / Examinatrices : Christophe Petit, Laure Fontana, Ludovic Slimak, Jacques-Elie Brochier, Edwige Pons-Branchu, Paola Villa, Yves Perrette

Résumé

FR  |  
EN

L’étude des sociétés passées passe par la compréhension de leur organisation sociale. Une des fenêtres pour y accéder est l’étude des schèmes de mobilité et des dynamiques d’occupation du territoire, qui ne sont accessibles qu’avec une haute résolution temporelle. Si cette résolution micro-chronologique (sub-annuelle à décennale) est accessible aux ethnologues, elle ne l’est généralement pas aux archéologues préhistoriens, dont les assemblages archéologiques sont malheureusement presque exclusivement cumulatifs et se forment pour la plupart sur le temps long. Dans l’optique d’atteindre une haute résolution temporelle en archéologie, l’objet de cette thèse de Doctorat a été de développer la Fuliginochronologie (de fuligine : suie), étude microchronologique des dépôts de suie prisonniers dans des concrétions calcaires, témoins des occupations humaines dans les cavités. L’analyse de cet objet géoarchéologique consiste ainsi en une étude anthropologique des sociétés passées. Le corpus d’étude de la thèse est constitué de fragments de parois recouverts de concrétions fuligineuses et collectés dans les douze niveaux archéologiques pléistocènes de la Grotte Mandrin (Malataverne, Drôme, France), attribués au Paléolithique moyen et à la transition entre Paléolithique moyen et Paléolithique supérieur, et dans un treizième niveau holocène contenant principalement des vestiges de crémations néolithiques. Le site se situe en moyenne vallée du Rhône, rive gauche (est), et surplombe un bras mort du fleuve, au niveau d’un rétrécissement : le défilé de Donzère, donnant à l’abri une position privilégiée dans le paysage à la croisée de différents biotopes. Des analyses complémentaires (...) ont permis de démontrer le potentiel de datation des concrétions fuligineuses, de mieux comprendre leur genèse et les processus post-dépositionnels les affectant, et surtout de démontrer la nature annuelle des doublets de calcite qui les constituent et qui sont observables pour la plupart des échantillons. L’observation microscopique de lames minces et/ou de sections polies réalisées dans l’axe de croissance des concrétions révèle que ce qui pouvait apparaître comme une unique lamine noire à l’œil nu ou à faible grossissement se résout généralement en une multitude de fins films de suie de quelques micromètres d’épaisseur. Les codes-barres inventoriés sont ensuite mis en correspondance afin de reconstruire la chronique des occupations humaines dans l’abri pour chaque niveau archéologique. L’étude conjointe des films de suie et des doublets de calcite permet quant à elle de caler les chroniques sur une échelle de temps microchronologique. À ce jour, peu d’études se sont intéressées à ce matériau et, pour la première fois ici, nous avons pu construire les chroniques des occupations humaines dans un abri-sous-roche pour l’ensemble des niveaux archéologiques du site : la Grotte Mandrin. Parmi les résultats, nous avons notamment pu déterminer un Nombre Minimum d’Occupations par niveau archéologique, ou encore mettre en évidence des dynamiques d’occupation du site (et dans une certaine mesure du territoire), différentes entre les niveaux archéologiques, via l’identification de rythmes d’occupation intégrés au cycle annuel de nomadisme ou au sein de cycles pluriannuels. Cette finesse de perception, jusqu’ici inaccessible pour l’étude des populations anciennes, permet également de démontrer que la succession entre les derniers Néanderthaliens et les premiers Homo sapiens régionaux s’est faite, sur ce site, en un temps très court qui peut être évalué à un an, indiquant une contemporanéité de ces deux humanités, sur un même territoire. Les perspectives de recherche de la fuliginochronologie sont diverses. Cette méthode microchronologique présente un large domaine d’application tant chronologique que géographique, puisqu’elle peut être appliquée partout dans le monde et pour toutes périodes, tant que des feux ont été faits à proximité de concrétions actives.