Thèse soutenue

Apport de la bioacoustique pour le suivi d’une espèce discrète : le Loup gris (Canis lupus)

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Auteur / Autrice : Morgane Papin
Direction : François GuéroldJulian PichenotEstelle Germain
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Écotoxicologie, biodiversité, écosystèmes
Date : Soutenance le 28/11/2018
Etablissement(s) : Université de Lorraine
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale SIReNa - Science et ingénierie des ressources naturelles (Lorraine)
Partenaire(s) de recherche : Fondation : Centre de recherche et d'observation sur les carnivores
Laboratoire : Laboratoire Interdisciplinaire des Environnements Continentaux (Vandoeuvre-lès-Nancy)
Jury : Président / Présidente : Isabelle Charrier
Examinateurs / Examinatrices : Olivier Adam, Jérôme Sueur
Rapporteurs / Rapporteuses : Olivier Adam, Luigi Boitani

Résumé

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Le nombre croissant de travaux réalisés ces dernières années a montré que la bioacoustique est particulièrement intéressante pour le suivi d’espèces discrètes. L’émergence de dispositifs d’enregistrement autonomes, associée à de nouvelles méthodes d’analyse, ont récemment participé à l’accroissement des études dans ce domaine. Au cours des 30 dernières années, le Loup gris (Canis lupus), mammifère carnivore aux mœurs discrètes connu pour ses hurlements de longue portée, a fait l’objet de nombreuses études acoustiques. Ces dernières visaient notamment à améliorer son suivi, qui s’avère complexe du fait des grandes capacités de déplacement des loups, de l’étendue de leurs territoires et de la diversité des milieux dans lesquels ils vivent. Cependant, la bioacoustique passive a jusqu’alors très peu été exploitée pour le suivi du Loup. C’est dans ce contexte que la présente thèse s’est organisée autour de trois axes de recherche. Les deux premiers axes portent sur l’apport de la bioacoustique passive pour le suivi du Loup gris en milieu naturel. En combinant des analyses acoustiques, statistiques et cartographiques, le premier objectif a été d’élaborer une méthode pour l’échantillonnage spatial de vastes zones d’étude, afin d’y détecter des hurlements de loups à l’aide de réseaux d’enregistreurs autonomes. Ce même dispositif a ensuite permis, dans un second temps, de tester la possibilité de localiser les loups grâce à leurs hurlements. Les expérimentations conduites en milieu de moyenne montagne (Massif des Vosges) et de plaine (Côtes de Meuse), sur deux zones d’étude de 30 km² et avec un réseau de 20 enregistreurs autonomes, ont permis de démontrer l’intérêt de la bioacoustique passive pour le suivi du Loup gris. En effet, près de 70% des émissions sonores (son synthétique aux propriétés similaires à celles de hurlements de loups) ont été détectés par au moins un enregistreur autonome en milieu de moyenne montagne et plus de 80% en milieu de plaine, pour des distances enregistreurs– source sonore atteignant respectivement plus de 2.7 km et plus de 3.5 km. Grâce à un modèle statistique et à un Système d’Information Géographique, la probabilité de détection des hurlements a pu être cartographiée sur les deux zones. En moyenne montagne, elle était forte à très forte (>0.5) sur 5.72 km² de la zone d’étude, contre 21.43 km² en milieu de plaine. Les sites d’émission ont été localisés avec une précision moyenne de 315 ± 617 (SD) m, réduite à 167 ± 308 (SD) m après l’application d’un seuil d’erreur temporelle défini d’après la distribution des données. Le troisième axe de travail porte quant à lui sur l’application d’indices de diversité acoustique pour estimer le nombre d’individus participant à un chorus et ainsi contribuer au suivi de l’effectif des meutes. Les valeurs obtenues pour les six indices (H, Ht, Hf, AR, M et ACI) étaient corrélées avec le nombre de loups hurlant dans les chorus artificiels testés. De bonnes prédictions de l’effectif ont été obtenues sur des chorus réels avec l’un de ces indices (ACI). L’influence de plusieurs biais sur la précision des prédictions de chacun des six indices a ensuite pu être étudiée, montrant que trois d’entre eux y étaient relativement peu sensibles (Hf, AR et ACI). Finalement, les résultats obtenus avec les enregistreurs autonomes montrent le potentiel des méthodes acoustiques passives pour la détection de la présence de loups mais aussi pour les localiser avec une bonne précision, dans des milieux contrastés et à de larges échelles spatiale et temporelle. L’utilisation des indices de diversité acoustique ouvre également de nouvelles perspectives pour l’estimation de l’effectif des meutes. Prometteuses, l’ensemble des méthodes émergeant de ce travail nécessite à présent quelques investigations complémentaires avant d’envisager une application concrète pour le suivi du Loup gris dans son milieu naturel