Thèse soutenue

Immanuel Wallerstein : de la sociologie du développement à l’histoire globale
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Auteur / Autrice : Yves David Hugot
Direction : Stéphane Haber
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Philosophie
Date : Soutenance le 21/09/2017
Etablissement(s) : Paris 10
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Connaissance, langage, modélisation (Nanterre)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire de sociologie, philosophie et anthropologie politiques (Nanterre ; 2004_...)
Jury : Président / Présidente : Stéphane Dufoix
Examinateurs / Examinatrices : Stéphane Haber, Stéphane Dufoix, Magali Bessone, Eric Vanhaute, Matthieu Renault
Rapporteurs / Rapporteuses : Magali Bessone, Eric Vanhaute

Résumé

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Dans cette thèse nous avons cherché à prendre la mesure de la rupture épistémologique produite par l’analyse des systèmes-monde dans le champ des sciences sociales à travers l’étude d’un de ses principaux représentants, Immanuel Wallerstein. Dans un premier temps, ses recherches sur les mouvements nationalistes, la décolonisation et les indépendances africaines, se sont inscrites dans le cadre de ce qu’on a appelé la théorie de la modernisation qui corrélait changements sociaux et développement. Un tel modèle reposait sur une philosophie de l’histoire progressiste ordonnant les sociétés pensées comme des entités discrètes sur un axe menant de la tradition à la modernité, de sociétés agraires et rurales pauvres et oppressives pour l’individu à des sociétés urbaines industrielles prospères et individualistes. L’échec du développement des pays africains au cours des années 60 a fait douter Wallerstein de la pertinence de ce modèle. Il a alors cherché à élaborer une théorie alternative de la modernité à l’échelle globale. Au lieu de lire l’histoire mondiale selon le fil d’une modernisation qui serait un processus se réalisant à l’échelle sociétale, il l’a organisée autour de l’échange inégal entre zones exploiteuses et exploitées appartenant à un même système social appelé « système-monde moderne. » L’histoire de la modernité depuis la Renaissance et la conquête de l’Amérique devenait alors celle d’une polarisation continue entre les différentes zones de ce système, sa globalisation à partir de la deuxième moitié du dix-huitième siècle et durant tout le dix-neuvième ne faisant qu’étendre au monde entier l’inégalité entre un centre développé et une périphérie sous-développée. Au-delà de la critique de la théorie de la modernisation et du développementalisme, l’analyse des systèmes-monde a aussi procédé à une remise en cause de l’image progressiste de l’histoire qui s’était imposée depuis la philosophie des Lumières. Le système-monde moderne apparu au tournant du quinzième et du seizième siècle, comme tout système, aura une fin, comme il a eu un début. Nous vivons dans un système social qui en tant que tel est voué à disparaître sans qu’on puisse dire s’il constitue un progrès par rapport aux précédents (jamais aucun système social n’a été aussi inégalitaire), ni s’il donnera naissance à un système qui sera meilleur (en bifurcation chaotique l’avenir est incertain).En élaborant une autre « chronosophie » (Krystof Pomian), une autre « image » (Thomas Kuhn) de l’histoire que celle, progressiste, qui sous-tendait le développementalisme et la théorie de la modernisation, c’est bien une révolution copernicienne et une rupture épistémologique dans les sciences sociales qu’expose l’analyse des systèmes-monde. C’est donc bien un nouveau paradigme qu’elle se propose de constituer, l’œuvre de Wallerstein incarnant le passage des histoires mondiales classiques fondées sur le nationalisme méthodologique et l’idée de progrès, vers les histoires globales actuelles.