Thèse soutenue

Production, compréhension et imitation des constructions causatives chez des enfants monolingues francophones et bulgarophones âgés de 3 à 6 ans

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Auteur / Autrice : Yanka Bezinska
Direction : Jean-Pierre ChevrotIva Novakova
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences du langage - linguistique
Date : Soutenance le 30/06/2014
Etablissement(s) : Grenoble
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale langues, littératures et sciences humaines (Grenoble ; 1991-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire de linguistique et didactique des langues étrangères et maternelles (Grenoble) - Laboratoire de linguistique et didactique des langues étrangères et maternelles
Jury : Président / Présidente : Aliyah Morgenstern
Rapporteurs / Rapporteuses : Harriet Jisa, Zlatka Guentchéva

Résumé

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La présente recherche doctorale traite des constructions causatives dans une perspective développementale et contrastive. Elle poursuit un double objectif. D'une part, démontrer que la complexité morphosyntaxique des mécanismes causatifs joue un rôle important dans le processus de leur acquisition par les enfants. D'autre part, prendre en considération plusieurs habiletés langagières (production, compréhension, imitation) pour explorer pleinement les divers niveaux de maitrise des constructions causatives. Les deux langues que nous étudions – le français et le bulgare – n'utilisent pas les mêmes mécanismes pour encoder la notion de causativité. Le français privilégie le prédicat complexe faire + Vinf, mais accepte également quelques causatifs lexicaux (nourrir X). Le bulgare fait appel à trois procédés : lexical (xranja X – nourrir X), morphologique (le préfixe ‘raz-' : razsmivam X – faire rire X) et périphrastique (karam X da V présent – inciter X à ce que V présent). Un total de 113 francophones (71 enfants et 42 adultes) et de 96 bulgarophones (56 enfants et 40 adultes) participent à cette étude contrastive ; tous sont des locuteurs natifs monolingues. Les enfants sont répartis en trois tranches d'âge (3-4 ans, 4-5 ans et 5-6 ans) et ils participent à trois tâches expérimentales (production, compréhension, imitation). Les adultes sont enregistrés uniquement en tâche de production. Notre recherche aboutit à quelques résultats intéressants. Premièrement, entre 3 et 6 ans, la conceptualisation de la causativité ne pose pas de problèmes particuliers aux enfants francophones et bulgarophones ; ils comprennent les mécanismes causatifs de leur langue. Deuxièmement, l'ordre d'acquisition des formes causatives est étroitement lié à leur degré de complexité morphosyntaxique. Dans les deux langues étudiées, les causatifs lexicaux sont complètement maitrisés par les enfants. En revanche, malgré son caractère compact et sa simplicité formelle, le causatif morphologique du bulgare semble apparaitre tardivement. La présence d'erreurs par surgénéralisation chez les enfants âgés de 5 à 6 ans révèle que l'acquisition de ce mécanisme causatif n'est pas achevée. La construction périphrastique karam X da V présent, quant à elle, peut être considérée comme maitrisée, puisqu'entre 4 et 5 ans, les habiletés des enfants bulgares à la produire sont déjà très proches de l'usage adulte. Enfin, le prédicat complexe faire + Vinf est en voie de stabilisation ; les enfants français doivent faire quelques ajustements au niveau de l'intégrité de la séquence faire + Vinf et de l'usage de l'argument causataire (sa fonction syntaxique et sa présence dans les énoncés). Troisièmement, le rappel de la structure des mécanismes causatifs en tâche d'imitation améliore les performances productives des enfants. En conclusion, par la prise en compte de trois habiletés langagières, cette étude apporte un éclairage dans la recherche sur les constructions causatives. Dans l'esprit du Modèle de compétition et des approches basées sur l'usage, notre travail valide également la pertinence de trois principaux facteurs déterminant l'ordre d'acquisition des unités linguistiques : 1/ fréquence dans l'input (ou disponibilité) ; 2/ fiabilité (ou spécialisation dans l'expression d'une fonction communicative) ; 3/ complexité (formelle et conceptuelle).