Thèse soutenue

Exprimer le passé en français : quels problèmes pour les étudiants vietnamiens ?

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Auteur / Autrice : Bui Khuong Bich Hoan
Direction : Christine Barré-de MiniacCatherine Brissaud
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences du langage
Date : Soutenance en 2005
Etablissement(s) : Grenoble 3

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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L'enseignement du français langue étrangère pose non seulement des problèmes didactiques, mais aussi des problèmes linguistiques. La préoccupation de ces derniers n'a pas d'autres ambitions que de rentabiliser les premiers. Les temps verbaux du français figurent parmi les questionnements dont la mise en évidence doit exercer une influence directe sur leur transmission à l'intention du public apprenant dont le français n'est pas la langue source. Les explorations dans le domaine verbal ne manquent pas et ne datent pas d'aujourd'hui. Mais la plupart des investigations à orientation didactique, au lieu d'expliquer le fonctionnement des temps verbaux, précisément le processus de leur formation, centrent sur l'analyse des formes verbales comme des produits bien conçus, dans le but traditionnel d'interpréter leurs valeurs et leurs effets, alors que la phase de leur conception est déjà passée et reste toujours dans l'ombre. Plutôt que de nous adonner dans la typologie sémantique des temps verbaux, comme beaucoup d'autres le font, nous nous sommes fixée l'objectif de savoir ce qui se passe au début de leur production. Nous avons élargi l'examen du temps jusqu'à la dimension cosmique et l'avons abordé dans ses différents aspects pour savoir à quel type de matière nous sommes confrontée et dans quelle mesure cette dimension nous est profitable pour les finalités didactiques. Dans cet esprit, nous avons souligné que le temps extérieur est à la base du temps linguistique, autrement dit, le temps extérieur est considéré comme un concept à partir duquel l'homme en conçoit un autre ayant pour fonction de refléter celui-là. Le temps linguistique devient donc un reflet de ce reflet. De sa dimension cosmique jusqu'à ses expressions linguistiques, le temps devient de plus en plus humanisé et sémiotique. Il possède au bout de son parcours, ses propres caractéristiques et des caractéristiques propres à chaque langue. C'est à ce temps linguistique que nous nous sommes intéressée dans ce travail en le considérant dans ses interactions avec le temps extérieur. Nous avons présenté les spécificités de l'expression du temps en vietnamien avant d'exploiter des caractéristiques des temps verbaux en français, exploitation faisant large part aux considérations d'ordre énonciatif et psychologique. Cette approche fait intervenir, outre les temps du passé, objet central de notre travail, le présent d'énonciation. Sur la base des observations d'ordre linguistique et anthropologique, nous avons élaboré des séquences didactiques suivant une démarche innovante, démarche se proposant d'aborder la question de l'enseignement de l'usage des temps verbaux à partir des représentations du locuteur, représentations du contexte et représentations des usages en contexte. L'expérimentation de cette approche s'est réalisée avec deux groupes d'étudiants en première année d'université de français à l'université d'Ho Chi Minh ville : groupe expérimental où ont été appliquées les séquences didactiques et groupe témoin où a été maintenue l'approche classique consistant en l'analyse des valeurs sémantiques et des effets stylistiques des temps verbaux en question. Les deux groupes ont suivi l'enseignement sur le même thème, à savoir l'emploi du passé composé et de l'imparfait, dans la même période de l'année et suivant le même volume horaire. Nous avons choisi de faire travailler sur le passé composé et sur l'imparfait étant donné les difficultés d'emploi de ces deux temps verbaux auxquelles étaient confrontés les étudiants vietnamiens durant leur apprentissage du français. La comparaison entre les deux groupes s'est effectuée sur la base d'une épreuve soumise en amont et en aval aux étudiants des deux groupes. L'analyse des résultats aux épreuves menée d'un point de vue quantitatif puis qualitatif permet de conclure globalement en faveur de nos hypothèses didactiques. Néanmoins, ce résultat global mérite d'être nuancé en raison des progrès limités obtenus par le groupe expérimental au dernier exercice de l'épreuve constituée de quatre exercices (exercices de production de phrases, de complètement de texte, de réponses à choix multiple, et de production de texte). Cela dit, les investigations anthropologiques, linguistiques et didactiques que nous avons déployées doivent être comprises comme une tentative d'ouvrir la voie à un meilleur rendement de l'intervention didactique. La voie est donc seulement ouverte, il reste à en définir le tracé, sans doute plus complexe que celui que nous avons pu seulement esquisser dans ce travail. Le terrain le plus attendu pour une exploration plus profonde, c'est la relation entre énonciation et énoncé, à savoir le mécanisme par lequel tel ou tel temps verbal est engendré, une recherche qui doit s'annoncer comme prioritairement psychologique.