Thèse soutenue

Coordination des communautés de pratique : les rôles différenciés de la réputation et de la confiance

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Auteur / Autrice : Paul Muller
Direction : Patrick Cohendet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences Economiques
Date : Soutenance en 2004
Etablissement(s) : Strasbourg 1

Mots clés

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Résumé

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Dans le cadre d'une économie basée sur la connaissance, une part croissante des processus de production et de diffusion des connaissances est assurée par les communautés de pratique. Ces dernières, en fournissant des espaces intangibles propices à la circulation d'informations et de connaissances, jouent un rôle important dans les processus d'apprentissage collectifs. De telles communautés peuvent être définies de manière générales comme des structures d'interactions sociale ayant pour but la génération et la diffusion de connaissances. Plus précisément, de telles communautés représentent des groupes d'individus engagés dans une pratique commune et interagissant fréquemment en vue de développer leurs compétences dans le domaine considéré. Du fait de l'absence de tout schéma contractuel en leur sein, un des traits fondamentaux des communautés correspond à la liberté laissée à leurs membres dans la détermination de leur trajectoire de spécialisation. En d'autres termes, il leur est possible de déterminer de manière décentralisée tant le volume que la nature de leur contribution à l'entreprise de développement d'une pratique commune. Une telle liberté laissée aux membres va néanmoins de pair avec certaines interrogations concernant l'efficacité du système. Plus précisément, se font jour deux catégories de problèmes. Sur le plan des incitation, l'absence de schémas contractuels peut donner l'opportunité aux membres de s'engager dans des comportements opportunistes du type passager clandestin. Sur le plan de la coordination, se pose un problème d'efficacité des activités des membres. En effet, en l'absence d'une division claire et imposée des tâches au sein de la communauté, les individus peuvent s'engager soit dans des activités disparates, donnant ainsi lieu à un problème de cohérence, soit dans des activités redondantes, conduisant à une sous-utilisation des capacités cognitives des agents. Le but de ce travail de thèse est d'étudier certains des mécanismes présidant à la coordination et aux incitations des agents au sein des communautés de pratique. Dans cette optique il est proposé que celle-ci est soutenue par l'émergence d'individus jouissant d'un statut particulier au sein des communautés : les leaders communautaires. De manière très basique, le leadership est ici défini comme la capacité d'influencer les comportements individuels par une influence exercée sur les flux d'informations et de connaissances par l'adoption d'une position centrale au sein de la communauté. Une telle capacité est obtenue par la conjugaison de deux attributions complémentaires des leaders. Premièrement, la capacité de contraindre les flux de communication est issue de leur capacité de médiation, liant ainsi des parties éloignées de la communauté. Une telle capacité permet aux leaders, par le filtrage des flux de communication se produisant au sein de la communauté, d'apporter une cohérence dans la base de connaissances communes. Deuxièmement, les leaders bénéficient d’un accès privilégié aux informations et connaissances, issu de la multiplication des relations avec d'autres membres de la communauté. Sachant cela, les membres supposent que les leaders, confrontés à un niveau d’incertitude plus faible, sont en mesure de prendre de meilleures décisions. Ces derniers sont dès lors susceptibles de faire l'objet de comportements de mimétismes. Le leadership constitue un phénomène émergent dans le sens où il est issu d'un processus d'auto-organisation. Dans cette optique, les leaders communautaires appuient leur statut sur la conjonction d'effets de réputation et de confiance. La réputation est ici entendue comme un ensemble d'informations concernant des éléments constants et récurrents dans le comportement passé d'un individus. Ces informations sont partagées par les membres de la communauté. Ainsi, la réputation, en réduisant l'incertitude associée au comportement de l'individu dans le cadre d'une première interaction, permet de faciliter son occurrence. De ce fait, des individus dotés d'une forte réputation tendent à bénéficier d'un plus grand nombre de relations au sein de la communauté, leur permettant ainsi d'obtenir une position centrale en leur sein. La confiance vient suppléer la réputation dans le cadre de relations répétées entre deux partenaires. Cette dernière correspond à l'anticipation d'un comportement coopératif. Elle se fonde sur l'accumulation de connaissances sur les comportements passés de l'individu. Ces connaissances, en étant accumulées lors d'interactions antérieures, sont ainsi spécifiques à relation considérée. Ainsi, se tresse un lien étroit entre réputation et confiance.  Tandis que la réputation constitue une condition nécessaire à l'occurrence d'une première interaction entre deux individus, la confiance, en se substituant à cette dernière, permet de la faire perdurer.