Thèse de doctorat en Sciences biologiques
Sous la direction de Margaret Buckingham.
Soutenue en 2003
à Paris 11 .
Afin de mettre en évidence les propriétés et les comportements cellulaires qui sous-tendent la morphogenèse du cœur, nous avons adopté une approche clonale de marquage cellulaire chez la souris. Le gène rapporteur nlaacZ est activé spontanément, à faible fréquence, par recombinaison mitotique et des clones de cellules sont générés de façon aléatoire, à différents stades de développement. Nous avons intégré le gène rapporteur au locus de l'α-actine cardiaque, pour observer la taille et la distribution des clones produits dans le myocarde. Plusieurs milliers d'embryons à E8,5 et E1O,5, ainsi que des fœtus à E14,5 et des nouveaux-nés à P7, ont été disséqués. Nous montrons que les cellules du myocarde sont produites selon un mode prolifératif. Deux phases de croissance se succèdent avant et après la formation du tube cardiaque, au cours desquelles l'intercalation et le positionnement des cellules-filles sont régulés différemment. L'orientation de la croissance clonale préfigure l'architecture fine du myocarde et contribue à la morphogenèse différentielle des unités fonctionnelles du cœur. Nous montrons enfin que la régionalisation des cellules du myocarde, c'est-à-dire la restriction de leurs potentialités à ne participer qu'à l'une ou l'autre des unités fonctionnelles du cœur, se produit en plusieurs étapes. Nous mettons en évidence deux lignages, correspondant aux champs cardiaques primaire et secondaire. Ils ségrègent séquentiellement à partir d'un précurseur commun précoce et participent au cœur de façon chevauchante. Les cellules des unités adjacentes, sur l'axe artéro-veineux, sont ségrégées progressivement, probablement par restriction de la dispersion cellulaire. Ce n'est qu'au moment de la formation du septum interventriculaire qu'une frontière clonale est détectée, entre les ventricules. Nous discutons l'éclairage nouveau qu'apportent ces résultats sur les mécanismes de la morphogenèse du cœur, sur leur déterminisme génétique, ainsi que sur leur évolution.
To investigate the cellular properties and behaviour, which underlie heart morphogenesis, we have adopted a retrospective clonal approach to cell labelling in the mouse. The nlaacZ reporter gene is spontaneously activated, at low frequency, by mitotic recombination and clones of cells are generated randomly, at different stages of development. We have integrated the reporter gene into the α-cardiac actin locus, which permits observation of the size and the distribution of clones produced in the myocardium. Several thousands of embryos at E8. 5 and El0. 5, as well as foetuses at E14. 5, and neonates at P7, have been dissected. We show that myocardial cells are produced by a proliferative mode of growth. This takes place in two phases, before and after the formation of the cardiac tube, during which intercalation and positioning of daughter cells are regulated differently. Orientation of clonal cell growth prefigures the fine architecture of the myocardium and contributes to the differential morphogenesis of the functional units of the heart. We also show that regionalisation of myocardial cells, i. E. The restriction of their potential to participate in a given functional unit of the adult heart, proceeds in several steps. We distinguish two cell lineages, corresponding to the primary and secondary heart fields, which segregate sequentially from an early common precursor. Their contributions to cardiac units are overlapping, except in the left ventricle and the outflow tract respectively. Regionalisation of cells in adjacent units along the arterial-venous axis, is progressive, suggesting that it occurs by the restriction of cell dispersion. It is only at the time of the formation of the interventricular septum that a clonal boundary is detected, between the right and left ventricles. We discuss how these results shed new light on the mechanisms of heart morphogenesis, on their genetic determinism and on their evolution.