Thèse soutenue

Relations entre p53, perturbations cytocinétiques, apoptose et survie cellulaire après agressions génotoxiques et en présence ou non de caféine

FR
Auteur / Autrice : Gaël Deplanque
Direction : Jean-Pierre Bergerat
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Aspects moléculaires et cellulaires de la biologie
Date : Soutenance en 2002
Etablissement(s) : Université Louis Pasteur (Strasbourg) (1971-2008)

Mots clés

FR

Résumé

FR

Les altérations du gène suppresseur de tumeur p53 constituent l'événement génétique le plus fréquemment observé dans les cancers humains. La protéine p53 possède en effet de multiples fonctions qui sont au centre de la plupart des concepts majeurs de la cancérologie fondamentale. Certains de ses rôles dans la réponse cellulaire aux agressions génotoxiques (bloc G1/S, bloc G2/M et déclenchement de l'apoptose) ont été largement mis en avant. On admet ainsi que les tumeurs malignes où p53 est inactivée sont plus résistantes aux agents anticancéreux en raison de leur impossibilité à s'engager dans la voie de l'apoptose. L'utilisation d'agents radio ou chimiosensibilisants comme la caféine pourrait également permettre d'augmenter l'efficacité des agents génotoxiques de manière différentielle pour les cellules où p53 est inactivée. Curieusement, il n'existe aucune démonstration formelle de ces hypothèses et l'importance que l'on doit attacher au phénotype p53 d'un cancer n'est toujours pas établie en ce qui concerne son traitement ou son pronostic. Tout d'abord les effets de la caféine sur la progression à travers le cycle cellulaire de fibroblastes humains normaux ont été réexaminés après irradiation UV ou ionisantes. L'analyse en parallèle de la prolifération cellulaire et des cinétiques de cycle cellulaire couplée à des expériences de stathmocinétique a permis de démontrer de manière formelle que contrairement au dogme établi la caféine ne permettait pas d'abroger le bloc G2/M. Nous avons ensuite utilisé plusieurs variants isogéniques isophénotypiques de la lignée cellulaire de carcinome thyroi͏̈dien K1, deux de ces lignées étaient déficientes en p53 par l'expression constitutive soit de la protéine virale E6 soit d'une protéine p53 mutée dominante négative alors que deux autres retenaient un phénotype p53 sauvage. Les résultats ont alors pu être étendus à une lignée tumorale humaine en montrant que la caféine ne permettait pas d'outrepasser le bloc G2/M radio-induit et ce indépendamment du statut fonctionnel de p53. Pour tenter d'élucider les relations pouvant exister entre l'apoptose et la survie cellulaire en fonction du phénotype p53 et en présence ou non de caféine, nous avons étudié l'action du cisplatine sur les différents variants de la lignée K1 en prenant en compte ces différents paramètres. Après exposition à des doses croissantes de cisplatine, la survie cellulaire a été mesurée par formation de colonies, et l'apoptose a été quantifiée manuellement par comptage des corps apoptotiques. Nous avons ainsi pu démontrer que dans ce modèle le degré d'apoptose observé et la survie cellulaire après exposition au cisplatine ne semblent pas liées, l'ampleur du phénomène apoptotique ne pouvant donc pas être retenue comme déterminant de la chimiosensibilité. Ainsi l'inhibition quasi-totale voire complète de l'apoptose lorsque p53 est inactivée n'a pas de signification univoque en terme de sensibilité au cisplatine que ce soit en présence ou non de caféine. En conclusion, ces travaux nous ont permis de remettre en question un dogme établi depuis plus de trente ans. La caféine ne permet pas d'outrepasser le bloc G2/M, ceci aussi bien dans un modèle de cellules humaines normales que dans un modèle de cellules tumorales après irradiation ionisantes ou UV et ce indépendamment du statut p53 fonctionnel ou non. Ces travaux illustrent la nécessité de la rigueur à garder dans toute expérience de cytocinétique où les perturbations du cycle cellulaire sont à mettre en parallèle avec la prolifération cellulaire, but ultime du cycle cellulaire, sous peine de mauvaises interprétations expérimentales. D'autres études seront nécessaires avant de pouvoir généraliser ces observations à tout type cellulaire. Nous confirmons également une fois encore l'absence de parallèle stricte entre phénomène apoptotique et radio ou chimiosenbilité.