Thèse soutenue

Les contes de Maupassant ou les morceaux du "je"

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Auteur / Autrice : Catherine Lorenz
Direction : Louis Forestier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littérature française
Date : Soutenance en 1997
Etablissement(s) : Paris 4

Résumé

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Maupassant ne croit pas à la cohésion harmonieuse du tout. Aussi, dans ses contes s'efforce-t-il de décrire l'explosion de chaque structure constituée, et, en premier lieu l'éclatement de l'identité individuelle en une multitude de fragments autonomes. Dans les contes, le morcellement de la personne humaine s'opère autant sur l'apparence extérieure (le corps) que sur l'être intérieur (la pensée). Dépossédé du fonctionnement de son organisme par une force obscure qui le domine, l'être humain assiste, impuissant, à l'emballement de sa machine corporelle. Il ne maitrise plus ses gestes. Écartelé entre sa conscience demeurée lucide et des actes qui semblent ne plus lui appartenir, l'individu observe la mécanisation et la réification de son corps. La "chose humaine" est simple marionnette vidée de toute substance, ou vulgaire marchandise destinée à être vendue et achetée sur le marché d'un nouvel esclavagisme économique. Quant au morcellement intérieur de l'individu, il s'exprime principalement dans les dédoublements. Mais le Horla n'est pas l'unique illustration du double. Maupassant utilise la cellule du couple pour figurer cette insupportable dichotomie. Face à la bestialité de l'animal, confronté à l'altérité féminine, à la ressemblance avec son enfant, son père ou son frère, devant l'image étrangère que le miroir lui renvoie, l'individu scindé en deux "moi" incompatibles s'interroge sur son identité. Car le dédoublement de l'être entraine une dépossession du moi irréversible. La seule échappatoire réside dans la mort, qu'elle soit extériorisée par l'acte criminel, intériorisé par le repli dans la folie, actualisée par le geste suicidaire, ou figurée par des images de disparition. La vision pessimiste de l'auteur sur cet être morcelé voué à l'anéantissement apparait dans un grand nombre de récits. Elle illustre la singularité d'un univers envahi par les éclats d'un fantastique intérieur propre à Maupassant.